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ADVERSITÉ, MALTRAITANCE : Chez certains elles favorisent la résilience

Actualité publiée il y a 8 min 51 sec
Communications Psychology
C’est un message d’espoir, surtout en regard de l'incidence des actes de maltraitance à l’égard des enfants : l’adversité à l’enfance peut aussi rendre plus fort (Visuel Adobe Stock 746471213)

C’est un message d’espoir, surtout en regard de l'incidence des actes de maltraitance à l’égard des enfants : l’adversité à l’enfance peut aussi rendre plus fort, et plus résilient aux événements stressants plus tard dans la vie. Cette équipe de psychiatres et de psychologues de l’Université Yale nous explique dans la revue Communications Psychology, que cette adversité, lorsqu’elle est modérée et intervient à certaines périodes de l’enfance, peut conférer une capacité au cerveau à distinguer efficacement ce qui est sûr et ce qui est dangereux, et qui protège ainsi contre le développement de troubles anxieux, plus tard dans la vie.

 

En d’autres termes, si bien évidemment l’adversité à l’enfance n’est certainement pas un atout et doit être combattue sous toutes ses formes, s’il n’est pas contestable que faire face à des événements traumatisants ou stressants pendant cette période critique de développement du cerveau accroît, et jusqu’à 40 %, le risque de troubles anxieux à l'âge adulte, les effets de l’adversité sont spécifiques à chaque sujet.

« L’histoire est plus nuancée que cela »,

résume l’un des auteurs principaux, Lucinda Sisk, chercheur en psychologie à Yale : « si des niveaux plus élevés d’adversité dans l’enfance sont associés à un risque plus élevé de problèmes de santé mentale à l’âge adulte, nos travaux suggèrent que pour certains, l'adversité à l'enfance favorise la résilience aux troubles anxieux ».

 

De précédentes recherches ont montré que les enfants et les jeunes qui font face à l'adversité, comme des événements traumatisants ou stressants pendant la période critique du développement du cerveau -de la naissance à l’âge de 20 ans-, encourent un risque accru de 40 % de troubles anxieux à l'âge adulte.

 

L’étude menée auprès de 120 participants adultes révèle que selon le moment de son occurrence au cours de l’enfance, et selon sa gravité, l’adversité affecte la sensibilité des victimes à l'anxiété et à d'autres problèmes psychiatriques à l'âge adulte. Pour l’étude, les chercheurs ont évalué les schémas d’exposition à l’adversité chez ces 120 adultes au 4 stades du développement : la petite enfance, le milieu de l’enfance, l’adolescence et l’âge adulte. En utilisant la neuroimagerie, ils ont examiné les circuits corticolimbiques des participants (un réseau de régions cérébrales qui intègre les émotions, la cognition et la mémoire), en extrayant des mesures d’activation neuronale lorsque les participants visionnaient des images qui représentaient soit une menace, soit la sécurité. Cela a permis aux scientifiques de décrypter chez ces participants le processus de discrimination entre le danger et la sécurité et de comprendre comment ce modèle pouvait être lié à l’exposition antérieure à l’adversité. Cette analyse révèle que :

  • de nombreux participants qui ont enduré ces expériences pendant l'enfance et l'adolescence se révèlent ensuite plus résilients 

à leurs effets sur la santé mentale ;

 

  • le moment de l’adversité au cours de l'enfance entre 6 et 12 ans et/ou à l'adolescence et sa sévérité, plutôt de faible à modérée peut, chez certains, favoriser la résilience à l'anxiété plus tard dans la vie ;
  • les personnes qui exposées à cette adversité, ont développé cette résilience aux problèmes de santé mentale, présentent des schémas distincts d’activation cérébrale lorsqu’on leur demande de faire la différence entre le danger et la sécurité, un processus qu’on sait très perturbé chez les personnes anxieuses ;
  • en d’autres termes, ces personnes exposées à l’adversité à l’enfance, ont développé un modèle cérébral spécifique de discrimination entre menace et sécurité, associé à une résilience bien plus élevée ;
  • ce modèle cérébral spécifique associé à la résilience et à de moindres niveaux d’anxiété, est caractérisé notamment par une plus grande activation du cortex préfrontal en réponse à des signaux de sécurité.

 

3 modèles se détachent finalement :

  1. ceux qui ont peu ou pas connu l’adversité, ou très faiblement, présentent une activation neuronale très élevée face à la menace et une activation neuronale plus faible en situation de sécurité ;
  2. ceux qui ont été exposés à une adversité faible à modérée, mais significative, au milieu de l’enfance ou à l’adolescence, présentent une activation neuronale plus faible face à la menace et une activation neuronale plus élevée en situation de sécurité ;
  3. ceux qui ont été le plus exposés à l’adversité et le plus longtemps au cours de la vie, présentent une activation neuronale minimale à la fois face à la menace et face à la sécurité.

Les participants du groupe 2 deviennent en moyenne moins sensibles à l’anxiété ou plus résilients que les participants des 2 autres groupes. Ces conclusions suggèrent que c’est plutôt une exposition modérée et à une période donnée de l’enfance, à l’adversité, qui permet le développement d’une certaine résilience plus tard dans la vie. L’exposition à une forte adversité, comme à la maltraitance par exemple, n’emporte pas ces mêmes « bénéfices ».

 

L’étude démontre aussi qu’il est possible d’analyser cette variabilité complexe des résultats en matière de santé mentale chez des patients victimes d’événements traumatisants ou stressants pendant cette période critique de développement du cerveau. Comme l’exprime l’un des auteurs, « l’image est nuancée » et cette situation clinique illustre bien, au-delà de la nuance, l’importance d’une médecine personnalisée.

 

De manière plus scientifique, ces travaux sont aussi les premiers à identifier les processus neuronaux sous-jacents qui peuvent contribuer au risque de troubles anxieux ou au contraire à la construction d’une résilience après l’adversité.

 

« Cette étude offre un aperçu des périodes sensibles où le cerveau est particulièrement malléable et où les expériences des enfants sont susceptibles d’avoir le plus d’impact sur leur santé mentale plus tard dans la vie. Elle confirme également, et avec beaucoup d’espoir, que la capacité du cerveau à distinguer efficacement ce qui est sûr et ce qui est dangereux contribue à protéger contre le développement de troubles anxieux à la suite de l’adversité à l’enfance ».


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