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ALZHEIMER : Et si la mémoire perdait l’appétit ?

Actualité publiée il y a 5 années 1 mois 2 semaines
Science Transational Medicine
La résistance du cerveau à la ghréline, une hormone de la faim, est liée au déclin cognitif et à la perte de mémoire

Ces scientifiques de l’Université du Texas à Dallas viennent d’associer l'hormone de la faim, la ghréline, à la perte de la mémoire dans la maladie d'Alzheimer. Leurs travaux, publiés dans la revue Transational Medicine, suggèrent que la résistance du cerveau à la ghréline, une hormone de la faim, est liée au déclin cognitif et à la perte de mémoire associés à la maladie.

 

Ces conclusions, fondées sur l’analyse d’échantillons de tissu cérébral post-mortem prélevés chez des patients atteints et sur des expériences in vivo chez l’animal, ouvrent également une nouvelle piste thérapeutique pour ce trouble neurodégénératif incurable qui touche aujourd’hui environ 50 millions de personnes dans le monde et menace plus 150 millions de personnes à l'horizon 2050, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Quand la mémoire perd l’appétit, le cerveau perd sa plasticité

La ghréline participe à la connexion neuronale : produite dans l'estomac, la ghréline envoie des signaux au cerveau qui régulent l'équilibre énergétique et le poids corporel. Appelée hormone de la faim, la ghréline joue un rôle maintenant bien connu dans l'appétit, cependant l’hormone a également été, plus récemment, impliquée dans l'apprentissage et la mémoire. Dans un hippocampe en bonne santé, la ghréline se lie à des protéines appelées récepteurs de la ghréline, qui se combinent à des récepteurs activés de manière similaire pour le neurotransmetteur dopamine. Les deux récepteurs forment alors un complexe protéique qui permet le maintien de la communication entre les cellules du cerveau et contribue ainsi à la formation et la consolidation de la mémoire.

 

Tout se joue au départ dans l’hippocampe : l'hippocampe joue un rôle essentiel dans la formation de la mémoire et la cognition. C’est l'une des premières victimes de la mort cellulaire et des lésions de la maladie d'Alzheimer en raison de l’accumulation toxique de fragments de protéines bêta-amyloïde. Ainsi, les lésions hippocampiques sont parmi les premiers changements visibles dans le développement de la maladie d’Alzheimer. Cependant, les mécanismes moléculaires responsables de ces altérations restent encore très mal compris. Sur des échantillons de cerveau aprovenant de patients atteints et d'un modèle murin de la maladie, l’équipe du Dr Tian montre ici, que dans l'hippocampe, la β-amyloïde pathologique se lie directement au récepteur de la ghréline (GHSR1α), qu'elle inhibe directement. Chez le modèle animal, la liaison bloque l'activation d’un récepteur, D1 (DRD1) médiée par GHSR1α, ce qui induit des altérations de la plasticité synaptique et la perte de mémoire.

 

Le rétablissement du récepteur de la ghréline sauve la plasticité synaptique : l'activation pharmacologique simultanée de GHSR1α et DRD1 permet de préserver la plasticité synaptique et d’inverser la perte de mémoire spatiale chez la souris modèle d’Alzheimer.

 

Le diabète, une résistance à l’insuline, l’« Alzheimer », une résistance à la ghréline ? Si cette étude reste fondamentale et valide à ce stade un concept, l’équipe se montre très enthousiaste sur ces premiers résultats. La découverte de ce processus par lequel la bêta-amyloïde se lie aux récepteurs de la ghréline dans l’hippocampe, ce qui bloque leur capacité à se combiner aux récepteurs de la dopamine ouvre de nouvelles perspectives thérapeutiques : "L’hypothèse que l'amyloïde empêche les récepteurs de la ghréline de fonctionner et que cette dissociation entre les récepteurs de la ghréline et de la dopamine puisse affecter la cognition des patients atteints de la maladie d'Alzheimer peut être comparée à l’état à d’insulinorésistance trouvé chez les patients atteintes diabétiques de type 2". Dans le diabète en effet, ce sont les récepteurs d'insuline qui fonctionnent mal. Pour compenser, les patients aux premiers stades du diabète de type 2 produisent plus d'insuline pour se lier aux récepteurs de l'insuline, mais ils deviennent insulino-résistants. Quelle que soit la quantité d'insuline produite par votre corps, les récepteurs de l'insuline sont incapables d'activer les réactions biochimiques en aval nécessaires au transport du glucose du sang vers les cellules. De la même manière, ces résultats suggèrent que la maladie d'Alzheimer pourrait être liée à la résistance à la ghréline.

 

Avec l’âge, notre métabolisme est altéré. Ces changements affectent le cœur et le système gastro-intestinal, mais affectent aussi le cerveau, en particulier en modifiant le récepteur de la ghréline. Même en l'absence de démence, de nombreuses personnes âgées ont des troubles de la mémoire. Cette dissociation des récepteurs dans le cerveau, même en l'absence de substance amyloïde, pourrait contribuer à les expliquer.

L’axe intestin-cerveau est à nouveau évoqué : « la maladie d'Alzheimer est un trouble systémique et nous devrions accorder plus d'attention à la voie métabolique et hormonale de la maladie ».


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