COVID-19 : De combien la pandémie a-t-elle déjà amputé notre espérance de vie ?
La pandémie COVID-19 aura des répercussions sanitaires et économiques à long terme. Cette analyse, menée aux Etats-Unis révèle que la pandémie COVID-19- qui a coûté la vie à plus de 2 millions de personnes dans le monde en 2020, apporte ainsi la première estimation de la réduction d’espérance de vie liée à la pandémie COVID-19 : l’espérance de vie à la naissance sera raccourcie de plus d'un an, selon ces travaux de l’University of Southern California (USC) et de Princeton, présentés dans les Actes de l’Académie des Sciences américaine (PNAS).
L’âge moyen du décès est ainsi « avancé » à 77,48 ans (en population générale américaine). On retiendra surtout de cette modélisation, la réduction d'une année en moyenne de l'espérance de vie, la plus forte estimée depuis au moins 40 ans avec un âge de décès estimé comme le plus faible depuis 2003. Enfin, cette réduction drastique de l'espérance de vie apparaît considérablement plus marquée pour les minorités, atteignant jusqu’à 3 années pour certains groupes de population. Précisément, aux Etats-Unis, le « gap » d’espérance de vie entre les groupes de différentes ethnies s'élargit de 40%, passant de 3,6 à plus de 5 ans, confirmant l'impact bien plus lourd de la maladie sur les groupes les plus défavorisés.
L'espérance de vie est un indicateur important de la santé d'une population
On oublie parfois que l'espérance de vie est aussi un indicateur important de la santé d'une population et que ces données illustrent d’une certaine manière l’échec des décideurs et des systèmes de santé à faire face au fardeau de la pandémie. L’auteur principal, Theresa Andrasfay, chercheur à l'USC Leonard Davis School of Gerontology, explique que « l’effet disproportionné de la pandémie COVID-19 sur l'espérance de vie des différents groupes ethniques s’explique principalement par les différences d’exposition via le lieu de travail, des contacts familiaux plus nombreux et un accès plus réduit aux soins de santé ». Les chercheurs soulignent enfin qu’une grande réduction de l'espérance de vie pour les minorités ethniques résulte en particulier du nombre disproportionné de décès à des âges plus jeunes au sein de ces groupes de population.
Le modèle développé a estimé l'espérance de vie à la naissance et à 65 ans pour 2020 pour l'ensemble de la population américaine par appartenance ethnique à partir de 4 scénarii de décès :
- un scenario « témoin » sans pandémie COVID-19 ;
- 3 scenarii basés sur différentes projections de mortalité COVID-19 de l'Institute for Health Metrics and Evaluation, un centre de recherche indépendant de l'Université de Washington.
- Quel que soit la projection de mortalité COVID-19 de base, la modélisation révèle une rupture dans l’évolution de l’espérance de vie.
Un tournant dans l’évolution de l’espérance de vie : durant les dernières décennies, l'espérance de vie avait suivi une amélioration faible mais globalement constante aux États-Unis. Seule petite exception à cette évolution, la période 2015 à 2017, avec une réduction annuelle de 0,1 an pendant ces 3 années consécutives attribuable aux overdoses dont d’opioïdes et de maladies et de suicides liés à l'alcool. Cependant cette nouvelle modélisation prévoit une baisse d’espérance de vie liée à la pandémie environ 10 fois plus importante que les baisses observées ces dernières années.
La vaccination contre le COVID-19 ne pas suffira pas à inverser la tendance : selon les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) si 10 millions d’américains ont déjà été vaccinés, il faudra du temps pour inverser, par la vaccination, l'impact de la maladie sur l'espérance de vie aux États-Unis.
En dépit de la vaccination, écrivent les chercheurs, il y aura des effets dramatiques à long terme sur la santé et l'économie qui pourraient entraîner une mortalité bien plus élevée pendant de nombreuses années - avec donc des effets persistants sur l'espérance de vie en 2021 et bien après.