COVID-19 : Faut-il ouvrir la vaccination à d’autres publics prioritaires ?
Donner la priorité à certains groupes de population pour la vaccination contre le COVID-19 peut permettre de sauver plus de vies, cependant, souligne cette équipe de l’Université de Californie – Davis, la stratégie de « priorisation » devrait évoluer en continu, en fonction de différents facteurs. Ainsi, il s’agit de se reposer régulièrement la question de vacciner en priorité les seniors ou les groupes plus vulnérables (comorbidités) ou bien les travailleurs de première ligne, concluent ces experts dans les Actes de l’Académie des Sciences américaine (PNAS). Cette équipe de modélisateur propose ici un premier cadre d’allocation dynamique optimale des vaccins.
Une remise en question qui peut affecter considérablement le nombre de décès et la propagation de l’épidémie, souligne l'auteur principal Michael Springborn, professeur à l'UC Davis et économiste spécialisé en santé environnementale. S'il est généralement admis que les personnes âgées devraient être prioritaires, des débats sont actuellement en cours sur la vaccination d’autres groupes en priorité. Certains experts suggèrent même de ne plus cibler du tout la vaccination. Alors quelle est la stratégie qui offre le plus grand avantage en santé publique ? Tout dépend de la situation...
La priorisation de la vaccination devrait évoluer en fonction de l’épidémie et des stocks de vaccins.
La hiérarchisation doit prendre en compte 2 caractéristiques principales, le niveau de risque d'infection des différents groupes de population et leur risque de complications (et de décès). « Or, nous savons que les travailleurs de première ligne ont moins de capacité à se « distancer » socialement et donc un risque élevé, alors que nos aînés ont une plus grande capacité de se « distancer » mais sont plus gravement touchés par l'infection.
La modélisation des taux de transmission du COVID-19 et de l'allocation optimale d'un approvisionnement en vaccins initialement limité dans différents scénarii suggère que :
- l’allocation des vaccins en priorité aux populations vulnérables (personnes plus âgées et travailleurs de première ligne confondus) permet de réduire les décès, les années de vie perdues et les infections de 17 à 44% en comparaison de l’approche qui consisterait à ne pas prioriser ;
- vacciner plus largement et rapidement dans les régions où le virus circule plus fortement et oùu l’incidence du COVID-19 est plus élevée est également un ciblage très « intéressant », en particulier lorsque dans ces zones, les populations respectent moins rigoureusement les mesures de distanciations ;
- sur la priorisation entre plus âgés et travailleurs de première ligne, les modélisateurs concluent que les travailleurs de première ligne devraient être un groupe prioritaire au même titre ou tout juste après les personnes âgées. Les stratégies qui ont ciblé simultanément l'âge et le statut de travailleur essentiel ont largement surpassé celles qui n’ont ouvert la vaccination que sur la base de critères d’âge ;
- accorder une priorité pour la vaccination aux travailleurs essentiels par rapport aux personnes âgées dépend du contexte : si l'épidémie est sous contrôle, il devient alors préférable de cibler d'abord les travailleurs essentiels pour réduire la propagation globale. Si l'approvisionnement en vaccins reste limité et que les cas et les décès continuent à augmenter, cibler directement les personnes âgées et les plus vulnérables apparaît, selon le modèle, la meilleure des stratégies.
Une stratégie de priorisation donnée ne doit pas rester figée au fil du temps. C’est probablement le message principal de cette modélisation qui jette les bases de l’évolution des priorités au fur et à mesure que les conditions changent, par exemple lorsque certains groupes sont majoritairement vaccinés : « Une fois qu'une grande proportion des personnes les plus vulnérables ou les plus susceptibles d'être exposées ont été vaccinées, la politique de vaccination peut être élargie".
« Il reste beaucoup à apprendre »,
soulignent les auteurs dans leur communiqué, car si la communauté scientifique et le public ont beaucoup appris sur le SRAS-CoV-2, de nombreuses questions subsistent : « dans quelle mesure exactement, les vaccins empêchent la transmission, dans quelle mesure le public respectera-t-il la distanciation une fois vacciné, et dans quelle mesure l'immunité sera durable avec l'apparition de nouvelles variantes ? »
Bref, une première approche analytique permettant une allocation dynamique optimale des vaccins, qui s'ajoute à la boîte à outils anti-COVID mais aussi avec des applications pour …d’autres épidémies.