COVID-19 : La contamination fécale est-elle possible ?
Désormais, il existe une accumulation de preuves étayant la possibilité d'une voie de transmission fécale du SRAS-CoV-2. Cette étude d’une équipe de la Rice University (Houston) rappelle que ce mode de transmission peut avoir un impact considérable en santé publique et donc nécessiter des recommandations concernant les risques liés à l'exposition aux eaux usées, les infections nosocomiales et la préparation des aliments. Des travaux, présentés dans l’International Journal of Infectious Diseases, qui appellent d'urgence à des recherches plus larges et de plus longue durée.
Si les principales voies de transmission du coronavirus SRAS-CoV-2 passent par des gouttelettes respiratoires ou aérosolisées, voire aéroportées, un contact étroit de personne à personne ou par l’intermédiaire de surfaces contaminées, plusieurs études de cas ont rapporté la présence de matériel génétique viral dans les selles de certains patients COVID-19. Les preuves étayant la possibilité d’une transmission à médiation fécale ou féco-orale se sont accumulées. Les chercheurs passent ici en revue les données actuelles de la littérature sur le sujet, les facteurs de risque de transmission fécale et les implications possibles en santé publique.
Simple présence de matériel génétique ou charge virale infectieuse ?
Si des études indiquent que le matériel génétique du virus est détectable dans les selles de certains patients COVID-19, on ignore si le virus peut se propager par les selles : « la plupart des études qui ont été réalisées jusqu'à présent recueillent de l'ARN viral dans les selles plutôt que « du virus infectieux » », relève l’auteur principal, le Dr E. Susan Amirian, épidémiologiste au Texas Policy Lab de Rice.
« Quelques rares études suggèrent que le virus infectieux peut néanmoins être présent dans les selles ».
Des données oui, mais encore limitées : à ce jour, un certain nombre d'études ont utilisé la RT-PCR pour détecter l'ARN de SARS-CoV-2 dans des échantillons de selles et des écouvillons anaux de patients atteints de COVID-19. Et, à l'exception d'une étude de cas portant sur un cluster familial, toutes ont identifié l'ARN du nouveau coronavirus dans les selles d'au moins certains patients infectés. La prévalence de la positivité des échantillons de selles varie cependant considérablement d'une étude à l'autre, mais ces études ont suivi des méthodologies très diverses. Ainsi, si la présence possible du virus dans les selles de patients COVID-19 est aujourd’hui démontrée, il reste difficile d'évaluer exactement quand le virus commence à excréter dans les selles (période d'incubation, au début de la maladie et / ou pendant la récupération ?). De plus, on ignore la durée de cette excrétion. Une étude cependant l’a constatée au-delà de > 30 jours après le début de la maladie.
Ce sont de premières données qui confirment le risque, mais qui méritent d’être précisées sur de plus grands échantillons et des durées de suivi qui couvrent plus largement la période de récupération, afin de pouvoir tirer des conclusions claires sur la durée de l'excrétion et les risques d’une telle exposition.
Du principe de précaution : identifier des virus viables dans les selles implique le risque de transmission fécale, avec des implications importantes, pour l'industrie de la restauration, les maisons de soins infirmiers, les garderies, etc… l'exposition aux selles ou à des eaux usées contaminées pourrait favoriser la propagation du virus et aggraver la pandémie. Si d’autres recherches devront donc confirmer l’identification de virus viables dans les selles, il nous appartient d’ores et déjà d'être plus prudents, en particulier dans les contextes où les gens ont un risque accru de morbidité et de décès en raison de COVID-19.
Ces chercheurs appellent à faire preuve d’une grande prudence et au respect des bonnes pratiques d'hygiène personnelle et professionnelle dans l’attente de nouvelles données. Ils rappellent les nombreuses autres maladies transmises par contamination fécale, notamment l'hépatite A et les norovirus.
Enfin, au stade des connaissances actuelles, les auteurs n’excluent pas que COVID-19 pourrait se propager de cette façon.