COVID-19 : Le microbiote intestinal en cause dans les formes longues
Le microbiote intestinal aurait-il aussi une influence sur le développement, la sévérité et la durée de la maladie COVID-19 ? C’est ce que suggère cette équipe de la Chinese University of Hong Kong : précisément, la composition du microbiome intestinal peut influer notamment sur le risque de COVID long. Ces travaux, présentés dans la revue Gut, suggèrent ainsi que le « profilage » du microbiome pourrait permettre d’identifier les personnes les plus susceptibles aussi de développer ces formes longues de la maladie.
La composition du microbiome intestinal pourrait donc en dire long sur risque d'un patient de développer un COVID long, une forme caractérisée par des complications et/ou des symptômes persistants des mois après l'infection initiale. Au fil des études, on réalise que ces formes longues touchent les 2 tiers des personnes hospitalisées et, plus généralement, 3 personnes sur 4 signalent au moins un symptôme 6 mois après récupération de l'infection au COVID-19. Parmi les symptômes les plus fréquemment signalés sur le long terme, la fatigue, la faiblesse musculaire et l'insomnie.
Si plusieurs causes sont évoquées pour ces formes longues, dont la réponse excessive du système immunitaire, des dommages cellulaires ou les conséquences physiologiques, on ne sait pas expliquer pourquoi certains patients développent un COVID long et d’autres non. Des preuves émergent cependant, qui impliquent le microbiome intestinal, pour expliquer la gravité et la durée du COVID-19.
L'intestin joue un rôle majeur dans l'immunité,
et son implication dans une réponse immunitaire exagérée à l'infection au COVID-19 est l’objet de cette étude.
L'étude : l’équipe chinoise a voulu savoir si la composition du microbiome intestinal pouvait être liée à un COVID long -caractérisé ici comme , défini comme la persistance d’au moins un symptôme 4 semaines après l'élimination du virus SRAS-CoV-2. L’équipe a donc suivi les changements dans le microbiome intestinal de 106 patients COVID-19 mais avec différents degrés de sévérité, traités entre février et août 2020 vs le microbiote intestinal chez un groupe contrôle de 68 témoins sans COVID-19, au cours de la même période. L’analyse d’échantillons de selles des participants prélevés à l'admission puis à 1 mois, puis 6 mois après l’infection -pour le groupe atteint- montre :
- l’absence de différence significative dans les facteurs potentiellement influents, tels que l'âge, le sexe, la prévalence des conditions sous-jacentes, l'utilisation d'antibiotiques ou de médicaments antiviraux, ou la gravité du COVID-19 entre les patients avec et sans COVID long, 6 mois après l'infection initiale ;
- parmi les 68 patients atteints de COVID-19 dont les échantillons de selles ont été analysés à 6 mois, 50 avaient un COVID long ;
- alors que la charge virale initiale n’apparaît pas associée à un COVID long, la composition du microbiome intestinal des patients ayant un COVID long apparaît moins diversifiée que celle des microbiomes des patients sans COVID long et des témoins n’ayant pas eu d’infection au COVID-19 ;
- à 6 mois, le microbiome intestinal des patients COVID mais n’ayant pas développé de COVID long est similaire au microbiome intestinal de témoins n’ayant pas eu le COVID ;
- une composition bactérienne spécifique est retrouvée chez les patients atteints de COVID long, avec 28 communautés bactériennes réduites et 14 enrichies. Cette signature est présente à la fois à l'admission à l'hôpital et à 3 et 6 mois après la sortie de l'hôpital ;
- ainsi, toujours à 6 mois, les patients atteints de COVID long significativement moins de « bonnes bactérie » F. prausnitzii et de Blautia obeum et plus de « mauvaises bactéries » Ruminococcus gnavus et de Bacteroides vulgatus vs témoins ;
- le microbiome intestinal des participants COVID mais pas COVID long ne présente qu’une partie de ces changements lors de l'admission à l'hôpital et la composition du microbiote est totalement revenue à la normale à 6 mois ;
- enfin, certaines espèces bactériennes apparaissent associées à différentes catégories de symptômes du COVID long ; de nombreuses espèces bactériennes sont associées à plus de 2 types de symptômes persistants ;
- plusieurs espèces connues pour renforcer l'immunité (notamment Bifidobacterium pseudocatenulatum, F. prausnitzii, R. inulinivorans et Roseburia hominis) sont épuisées chez les participants atteints de COVID long.
- d’autres espèces bactériennes sont associées à de moins bonnes performances au test de marche par exemple.
Pris ensemble, ces résultats suggèrent des profils microbiens intestinaux spécifiques à une susceptibilité accrue aux formes longues de la maladie. S’il s'agit d'une étude observationnelle qui ne peut établir de relation de cause à effet, ses données démontrent qu’une composition altérée du microbiome intestinal est fortement associée à des symptômes persistants chez les patients atteints de COVID-19.
Il serait donc intéressant d’étudier la possibilité de moduler le microbiote pour favoriser une récupération rapide et pour réduire le fardeau des COVIDs longs.
Autres actualités sur le même thème
COVID-19, MICI et immunomodulateurs : Quelques indications
Actualité publiée il y a 4 années 8 moisENTÉRITE, SEPTICÉMIE, INTOXICATION : Un vaccin contre Campylobacter ?
Actualité publiée il y a 2 semaines 1 jourINFECTION BUCCALE : Et si on laissait faire les bactéries commensales ?
Actualité publiée il y a 6 années 3 semainesMICROBIOTE : Une source de bactériémies chez le nouveau-né prématuré ?
Actualité publiée il y a 1 année 5 mois