COVID-19 : Pourquoi même après une infection le vaccin reste de mise
Le vaccin COVID-19 de Pfizer-BioNTech génère des structures immunitaires essentielles pour une immunité durable, confirme cette nouvelle étude d’une équipe de l'Université de Washington, publiée dans la revue Nature qui conclut à « une immunité forte et persistante au COVID-19 ». Mais au-delà, l’évaluation des niveaux d’anticorps chez des personnes vaccinées, ayant ou non été préalablement infectées, suggère tout l’intérêt de la vaccination, avec ou sans immunité naturelle.
Les auteurs, le Dr Ali Ellebedy, professeur agrégé de pathologie et d'immunologie et Jackson Turner, chercheur à la Washington University School of Medicine (St. Louis) rappellent que les 2 premiers vaccins COVID-19 autorisés pour une utilisation d'urgence par l’Agence américaine, Food and Drug Administration (FDA) ont exploité une toute nouvelle technologie. Les 2 vaccins ont démontré de bons résultats dans les essais cliniques et sur le terrain, et en épidémiologie, leur efficacité à réduire les infections et la sévérité de la maladie est largement reconnue.
Cependant, il subsiste des inquiétudes sur la durée de l'immunité vaccinale.
Cette nouvelle étude apporte de nouvelles preuves que la réponse immunitaire à ce type de vaccin est à la fois forte mais également de longue durée.
Des centres germinatifs persistants : l’étude montre en effet que 4 mois après la première dose, les participants ayant reçu le vaccin Pfizer présentent encore des « centres germinatifs » (des structures transitoires qui se forment après la vaccination) dans les ganglions lymphatiques produisant des cellules immunitaires dirigées contre le SRAS-CoV-2, le virus responsable de COVID-19. Ces centres germinatifs sont des « camps d'entraînement » pour les cellules immunitaires, expliquent les scientifiques, où les cellules inexpérimentées sont entraînées à mieux reconnaître et à mieux combattre le pathogène.
Une meilleure réponse du centre germinatif signifie un meilleur vaccin.
Des niveaux élevés d'anticorps neutralisants efficaces contre 3 variantes du virus, sont bien induits par la vaccination. C’est notamment le cas contre la variante bêta d'Afrique du Sud documentée pourtant comme présentant une certaine résistance aux vaccins. La vaccination semble induire des réponses anticorps plus fortes chez les personnes rétablies de l'infection par le SRAS-CoV-2 par rapport à celles qui n'avaient jamais été infectées.
Quelle durée de protection ? En avril 2021, Pfizer et Moderna avaient publié des données montrant que leurs vaccins offraient une protection d'au moins 6 mois. Ces rapports étaient basés sur le suivi de nombre de cas de COVID-19 chez des personnes vaccinées. D'autres études ont évalué les taux d'anticorps dans le sang et ont conclu que le vaccin offre au moins plusieurs mois de protection. Mais personne n'avait regardé comment la réponse immunitaire se développait dans le corps, ce qui pourrait fournir des indices importants sur la force et la persistance de la réponse immunitaire sans avoir besoin pour autant, d’années de suivi.
« Les centres germinatifs sont la clé
d'une réponse immunitaire protectrice et persistante », explique l’auteur principal, le Dr Ali Ellebedy, professeur agrégé de pathologie et d'immunologie, de médecine et de microbiologie moléculaire : « les centres germinatifs sont l'endroit où nos mémoires immunitaires se forment. Et plus nous avons un centre germinatif, plus notre immunité sera forte et durable car il y a un processus de sélection féroce qui s'y déroule, et seules les meilleures cellules immunitaires survivent. Ici, nous observons que les centres germinatifs sont toujours détectables 15 semaines après la première dose du vaccin. Nous les suivons toujours et ils ne semblent pas faiblir; chez certains patients, ils sont toujours actifs, c'est vraiment remarquable ».
Pourquoi certains vaccins protègent à vie ? Les scientifiques ne comprennent pas totalement pourquoi certains vaccins comme celui contre la variole, induisent une protection forte et à vie, alors que d'autres, comme le vaccin contre la coqueluche, nécessitent des rappels réguliers. Les chercheurs suggèrent néanmoins que la qualité des centres germinatifs induits par les différents vaccins pourraient faire toute la différence.
Et les vaccins à ARNm ? Les vaccins Pfizer et Moderna ont été créés avec la technologie de l'ARNm. Contrairement à la plupart des vaccins, qui fournissent des morceaux de protéines virales ou bactériennes pour déclencher une réponse immunitaire, les vaccins à base d'ARNm fournissent des instructions au corps pour construire et libérer des protéines étrangères, telles que la protéine de pointe dans le cas du virus SARS-CoV-2. Pour évaluer si ce nouveau type de vaccin induit une bonne réponse du centre germinatif, l’équipe a procédé à un échantillonnage guidé par ultrasons des minuscules centres germinatifs présents dans les ganglions lymphatiques de l'aisselle, chez 14 participants ayant reçu le vaccin Pfizer. Ces échantillons ont été obtenus 3 semaines après la première dose (juste avant l'administration de la deuxième dose) et aux semaines 4, 5 et 7. 10 des participants ont également donné des échantillons supplémentaires 15 semaines après la première dose. Aucun des participants n'avait auparavant été infecté par le virus qui cause le COVID-19. Ces analyses montrent que :
- 3 semaines après la première dose, les 14 participants avaient développé des centres germinatifs avec des cellules B produisant des anticorps ciblant une protéine clé du SRAS-CoV-2 ;
- cette réponse a considérablement augmenté après le rappel, puis est restée élevée au point que 15 semaines après la première dose, 8 participants sur 10 avaient encore des centres germinatifs détectables contenant des cellules B ciblant le virus.
« C'est la preuve d'une réponse immunitaire vraiment robuste »,
expliquent les chercheurs : « le système immunitaire utilise des centres germinatifs pour perfectionner les anticorps afin qu'ils puissent se lier au mieux et durer le plus longtemps possible".
Une seconde analyse, menée chez 41 participants ayant reçu le vaccin Pfizer, dont 8 ayant aussi été infectées par le virus constate que :
- chez les personnes sans exposition préalable au virus, les niveaux d'anticorps augmentent lentement après la première dose et culminent 1 semaine après la deuxième dose ;
- chez les personnes préalablement infectées donc présentant déjà des anticorps avant la première dose, les niveaux d’anticorps augmentent plus rapidement après la première dose et culminent plus haut que chez les participants non infectés.
Ainsi, une personne déjà infectée qui se fait vacciner bénéficie aussi d’une forte augmentation de ses niveaux d'anticorps. Le vaccin apporte donc un avantage, même dans le contexte d'une infection antérieure !