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COVID-19 : Prioriser la vaccination, des avantages modestes

Actualité publiée il y a 3 années 10 mois 5 jours
Advanced Theory and Simulations
Appliqué à l’échelle d’une ville américaine moyenne, le modèle ne constate que des avantages modestes à une stratégie de priorisation de la vaccination ciblée sur les groupes les plus vulnérables (Visuel Adobe Stock 404043389).

Alors que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) rapporte au 19 janvier 2021, environ 94 millions de cas de COVID-19 recensés dans le monde, et plus de 2 millions de décès, les autorités sanitaires sont confrontées à des décisions difficiles : quelles politiques pour assurer au mieux la sécurité des populations tout en nuisant le moins possible à la qualité de vie et à l’économie ? Cette équipe de la New York University a développé une nouvelle plateforme de simulation, capable de créer à partir de données agrégées, des modèles de prédiction pour différents scenarios. Appliqué à l’échelle d’une ville américaine moyenne, le modèle ne constate que des avantages modestes à une stratégie de priorisation de la vaccination ciblée sur les groupes les plus vulnérables. Cette étude mathématique très complexe et très complète, proposée dans la revue Advanced Theory and Simulations, rappelle ainsi un bon principe, celui de la couverture vaccinale, et donc d’un nombre suffisant de vaccins.

 

Le modèle de prédiction est du type « ABM » (pour Agent Based Model ou modèle de calcul permettant de simuler les actions et interactions d'agents ou de groupes de population).  Basé sur un modèle AMB existant développé pour étudier la grippe, le modèle a été adapté pour étudier l'épidémie COVID-19 dans plusieurs directions. En pratique, il permet de reproduire la structure d’une ville ou d’une population, obtenue à partir des statistiques du recensement, et d'y superposer un ou plusieurs effets, ici l'épidémie accompagné de différentes variables associées ( mesures de distanciation, traitements, comportements, mobilité etc…).

Même avec la vaccination, les mesures de distanciation restent des outils clés pour lutter contre COVID-19.

Ici, les chercheurs font l’exercice sur une ville (New Rochelle) de dimension et de structure représentatives d'une petite ville typique des États-Unis :

  • A partir des statistiques du recensement, le modèle leur permet de reproduire, géographiquement et démographiquement, la structure de la ville étudiée ;
  • l'équipe intègre ensuite les 2 stratégies de dépistage mises en oeuvre, les tests traditionnels en milieu hospitalier et les tests "au volant" ;
  • les chercheurs prennent ensuite en compte les variations de cette stratégie du dépistage au fil du temps ;
  • ils ajoutent ensuite les principaux types de mesures et de traitement mis en oeuvre contre COVID-19, tels que le confinement, l'hospitalisation et l'hospitalisation en USI ;
  • ils suivent séparément les personnes présentant des symptômes de type COVID-19 dus à d'autres maladies comme la grippe ou le rhume ;
  • ils « modélisent » séparément les personnels des écoles, des hôpitaux et des maisons de retraite, pour prendre en compte ces professions de manière spécifique ;

 

A partir de là, le modèle permet d'étudier de manière sélective les interventions telles que le télétravail, l’enseignement à distance, la fermeture des écoles ainsi que les stratégies de réouverture, de déconfinement et de vaccination.

 

Différents scenarii possibles de vaccination : une fois le modèle validé par rapprochement des résultats obtenus par modélisation avec les données réelles, les chercheurs ont pu explorer les différents scenarii possibles de vaccination- tout en prenant en compte le nombre limité de vaccins disponible. Parmi les scenarii étudiés figurent :

  • la vaccination aléatoire ou volontaire,
  • la priorisation de la vaccination pour des groupes particulièrement vulnérables à l'infection au COVID-19.
  • Enfin, les chercheurs ont également regardé les avantages possibles de mesures, combinées à ces scenarii de vaccination, comme la fermeture des écoles et le télétravail.

 

L'effet très marginal d’une priorisation de la vaccination : parmi les résultats de cette modélisation, à l’échelle de la ville de New Rochelle, les chercheurs mettent en avant l’effet a priori très marginal d’une priorisation de la vaccination, en commençant par les personnes à risque élevé. « Cette stratégie de vaccination n’aurait que des effets très modestes sur le nombre de décès par COVID-19 », écrivent les auteurs : ainsi un scenario de vaccination d'un groupe prioritaire et restreint de personnes vulnérables (personnels des écoles, des maisons de retraite et des résidents) vs la totalité des 2.000 personnels hospitaliers de la ville, et vs 2.000 personnes sélectionnées au hasard parmi les 80.000 habitants, présente un avantage très marginal sur le nombre de décès dus au COVID-19 ;

En revanche, comme on pouvait s'y attendre,

une amélioration beaucoup plus significative est enregistrée avec une couverture vaccinale de 25%.

enfin, les avantages des mesures restrictives mises en place lors de la première vague surpassent très largement ceux de n'importe lequel de ces scénarii de vaccination sélective.

 

Un modèle plutôt fidèle : le modèle étant représentatif, les chercheurs suggèrent qu’il pourrait servir de plateforme d'analyse pour de nombreuses villes comparables en population et en structure. Même s’ils soulignent quelques limites à ce modèle, dont la marge d’erreur sur le nombre de cas en population générale, l’impact des infections des personnels soignants sur le traitement des patients hospitalisés, la surcharge des USI, l'utilisation réelle des équipements de protection individuelle (EPI)…Cependant, les chercheurs soulignent qu’en dépit de ces inconnues, leur modèle a abouti à une correspondance presque parfaite avec les données réelles observées tout au long de l'épidémie.

D‘autres applications possibles ? En effet, au-delà de l’évaluation des différentes stratégies de vaccination anti-COVID-19, le modèle pourrait être adapté pour décrire la propagation concomitante de la grippe avec COVID-19 qui pourrait « exacerber » l'impact des prochaines vagues. Et apporter ainsi aux décideurs des données précieuses pour décider des prochaines mesures et prendre les dispositions nécessaires pour les systèmes de santé.

 

On retiendra que, selon cette modélisation, le principe de base de la vaccination reste une couverture vaccinale suffisante. Et que les avantages des mesures de distanciation mises en œuvre lors de la première vague surpassent largement ceux de n'importe lequel de ces scénarii de vaccination "sélective".