COVID-19 : Une vulnérabilité génétique aussi
Plusieurs études ont documenté les principaux facteurs de risque de complications et de décès de COVID-19, dont l’âge avancé, le sexe masculin et les comorbidités préexistantes dont principalement l’obésité, le diabète et l'hypertension artérielle. Le tabagisme est également documenté comme un facteur de forme plus sévère de la maladie. Ces scientifiques de l’Université de Radboud (Pays-Bas) sont les premiers à suggérer et préciser des facteurs de risque génétiques. Leurs analyses, présentées dans le JAMA Open Network identifient le rôle clé d’un gène particulier, TLR7, qui en cas de mutation, laisse libre cours aux complications.
Les observations actuelles suggèrent que le coronavirus SARS-CoV-2 provoque des symptômes graves principalement chez les patients âgés atteints de maladie chronique. Cependant, lorsque ces médecins ont dû prendre en charge 2 jeunes frères auparavant en bonne santé, que ces jeunes patients ont nécessité une ventilation mécanique en unité de soins intensifs (USI), ils se sont évidemment posé la question des facteurs génétiques. Ces recherches identifient alors un gène au rôle clé dans la réponse immunitaire contre le SRAS-CoV-2.
Une découverte aux conséquences majeures pour la compréhension et le traitement de COVID-19
Des cas cliniques qui interrogent sur la vulnérabilité génétique : les 2 jeunes frères sont tombés gravement malades du virus SARS-CoV-2 et ont dû être pris en charge en USI. L'un d'eux est mort des conséquences de l'infection, l'autre s'est rétabli. Alors que les formes sévères sont rares chez les patients aussi jeunes, les médecins ont poussé l’analyse plus avant. « Dans un cas comme celui-ci, vous vous demandez immédiatement si des facteurs génétiques pourraient jouer un rôle », explique l’auteur principal, Alexander Hoischen, généticien. « Être malade d'une infection résulte toujours d’une interaction entre le virus et le système immunitaire. Ce ne peut être une simple coïncidence si 2 frères de la même famille tombent si sévèrement malades et la possibilité d’une anomalie de l’immunité innée se devait d'être étudiée ».
Sur le chromosome X ? Les scientifiques ont donc séquencé l'exome (gènes codants) des 2 frères à la recherche d'un possible facteur génétique commun. Les chercheurs ont principalement examiné les gènes qui jouent un rôle dans le système immunitaire et se sont concentrés sur le chromosome X qui porte la plupart de ces gènes et qui chez les hommes -qui n’ont qu’un seul X- ne peuvent être « remplacés ». La recherche révèle chez les 2 frères des mutations dans le gène codant pour le récepteur 7 de type Toll (TLR7), cette famille de récepteurs ayant un rôle important dans la reconnaissance d'agents pathogènes (tels que les bactéries et les virus) et l'activation du système immunitaire.
Des lettres manquantes dans le code génétique du gène TLR7 : en conséquence, aucune protéine TLR7 n'est produite. La recherche révèle ainsi que
- le gène codant TLR7 est essentiel pour la protection contre ce coronavirus.
- « Cette anomalie peut expliquer la sévérité de la maladie chez ces frères », écrivent les chercheurs.
Une confirmation ! Une autre paire de jeunes frères, âgées de moins de 35 ans, est ensuite également prise en charge au Centre médical de Radboud et transférée en USI pour ventilation mécanique. Avec, à nouveau, une lettre manquante dans le code du gène TRL7. Les 2 frères ne fabriquaient pas non plus suffisamment de protéine TLR7 fonctionnelle.
Le rôle essentiel de gène TRL7 dans la défense contre SARS-CoV-2 : une fois activé, TLR7 déclenche la production d’interférons, des protéines de signalisation essentielles à la défense contre les infections virales. Cette réponse immunitaire est d'autant plus importante dans la lutte contre le coronavirus que le virus a des astuces pour réduire la production d'interférons par les cellules immunitaires. Les tests montrent ici que les cellules immunitaires des patients sans TLR7 ne répondent pas suffisamment et que le virus semble avoir alors « libre cours » car il n'est pas reconnu, ou mal, par le système immunitaire. Cette anomalie génétique spécifique induit ainsi une immunodéficience face à ce coronavirus.
La découverte pourrait avoir des conséquences importantes pour le traitement des patients atteints de formes sévères de COVID-19 et ouvre pour ces patients la piste de l'administration d'interféron pour soutenir la réponse immunitaire.