CYSTITE : De nouvelles thérapies pour piéger E. coli
Au cours de leur vie, près de la moitié des femmes connaîtront une cystite, une infection urinaire localisée au niveau de la vessie, et 50 % de ces mêmes femmes connaîtront une récidive dans les 6 mois. L’infection est majoritairement causée par une souche uropathogène Escherichia coli (UPEC), une cible pathologique virulente et résistante à de nombreux traitements.
De nombreuses équipes ont donc travaillé à de nouvelles thérapies de la cystite, plus curatives et plus définitives qui, plutôt que de tenter d’éliminer le pathogène, visent à l’affamer ou à le piéger.
C’est le cas du dispositif médical contre la cystite Femannose N, qui attire E. coli avec un sucre, le D-mannose, et détourne ainsi la bactérie des glycoprotéines endogènes de la muqueuse urinaire.
Retour sur E. coli, une bactérie versatile, baladeuse mais gourmande, donc plus facile à allécher.
E. Coli, une bactérie polyvalente : à la fois commensale et pathogène, E. coli est un agent omniprésent du microbiome intestinal. La bactérie y réside dans un biofilm composé d'une communauté microbienne complexe où elle trouve tous les nutriments nécessaires à sa croissance (bactérie commensale). La bactérie est également exploitée comme hôte de clonage dans la technologie de l'ADN recombinant. Enfin, E. coli peut devenir un agent pathogène très polyvalent et parfois mortel : dotée de facteurs génétiques de virulence, la bactérie peut ainsi s’adapter à des environnements hôtes distincts et entraîner toute une série de complications, telles que la diarrhée ou la dysenterie mais aussi des infections extra-intestinales, dont des voies urinaires.
E. coli, une bactérie baladeuse : la bactérie, présente naturellement dans le tube digestif (côlon, rectum), peut ainsi s’échapper de l’intestin, pénétrer dans d’autres organes, dont l’urètre, remonter dans la vessie, et commencer à s’y multiplier. C’est le développement de la cystite. La faible longueur de l'urètre explique ainsi l’incidence plus élevée de la cystite chez la femme : ainsi, 50 % des femmes développeront une cystite au cours de la vie.
E. coli, une bactérie gourmande : E.coli pathogène se nourrit de sucres particuliers, et la souche UPEC en cause dans la cystite, de sucres spécifiques, dont l’arabinose, le fucose, le mannose, le N-acetylglucosamine et le ribose. La bactérie utilise ses pili pour se fixer à des N-glycanes (glycoprotéines ou monosaccharides reliés entre eux), riches en mannose et disséminés sur la surface uroépithéliale. Le mannose favorise ainsi l’adhésion de la bactérie à l'épithélium urinaire et la progression de l’infection dans l'appareil urogénital.
E.coli, une bactérie résistante : si les antibiotiques constituent le traitement de première intention (fosfomycine-trométamol en dose unique) et de deuxième intention (pivmécillinam) de la cystite, la bactérie est devenue largement antibiorésistante et l’infection fréquemment récurrente.
Plusieurs équipes ont donc travaillé soit à affamer la bactérie, en la privant de ses sucres favoris, soit à l’empêcher de s’arrimer à l’épithélium urinaire, en ciblant les glycoprotéines : une étude récente, publiée dans la revue Science, a révélé qu’une protéine produite naturellement par le rein, l'uromoduline est capable d’envelopper la cellule d'E. Coli, de « ferrer » ses pili et de l’empêcher ainsi de s'ancrer sur les muqueuses des voies urinaires.
Un important corpus de recherche a également été publié sur le développement de ces nouvelles thérapies anti-adhésion à base de mannose.