DÉMENCE : Un pont entre la microglie et les neurones pour sauver le cerveau
Construire des ponts entre les différents types de cellules, la microglie et les neurones, pour favoriser ou maintenir la santé du cerveau, c’est l’approche décryptée et suggérée par ces neuroscientifiques de l’Université du Luxembourg. Alors que l'accumulation de protéines toxiques est une caractéristique de plusieurs troubles neurodégénératifs, notamment de la maladie d'Alzheimer et de la maladie de Parkinson, la microglie a la capacité de sauver les neurones par l'élimination des protéines et le don de mitochondries. Ces travaux, publiés dans la revue Neuron, décryptent « le transfert de charge entre les neurones et la microglie via des nanotubes » et explorent les conséquences de cet échange sur la santé cellulaire.
L’auteur principal, le Dr Michael Heneka, chef du service Neuroinflammation, rappelle que ces protéines toxiques telles que l'alpha-synucléine et la protéine tau s'agrègent anormalement à l'intérieur des neurones et perturbent ainsi la fonction cellulaire essentielle. « Nous savions que la microglie jouait un rôle dans l'élimination de ces agrégats de protéines, mais nous ignorions qu'elle pouvait former des nanotubes sous forme de longues extensions qui peuvent relier des cellules distantes du cerveau ».
La microglie sauve les neurones par l’élimination des protéines toxiques et le don de mitochondries
L’étude est menée sur des cultures de neurones et de microglie, dérivées soit de modèles animaux, soit de cellules souches humaines, et à l’aide d’une technologie d’imagerie de pointe,
- décrypte le processus par lequel la microglie établit le contact avec les neurones par l’intermédiaire de ces nanotubes ;
- les débarrasse des amas de protéines toxiques ;
- transfère aux neurones des mitochondries saines -les centrales énergétiques des cellules-, ce qui réduit considérablement le stress oxydatif, restaure les fonctions cellulaires vitales et sauve finalement ces cellules nerveuses ; précisément, les scientifiques observent que lorsque la microglie a transféré des mitochondries saines aux neurones affectés, ce transfert rétablit production d’énergie, réduit les dommages oxydatifs, rétablit le fonctionnement et permet la survie des neurones ;
- lorsque des protéines toxiques s’accumulent dans les neurones, le nombre de nanotunnels reliant les deux types de cellules augmente et ces nanotubes contiennent bien de l’alpha-synucléine et des particules tau ;
- les protéines toxiques sont bien transférées des neurones à la microglie, et non l’inverse, et, une fois dans la microglie, elles sont dégradées au fil du temps.
Ces techniques de pointe ont donc permis d’observer, pour la première fois,
la formation de connexions entre les neurones et la microglie.
Si des recherches restent nécessaires pour comprendre en détail la formation et la fonction de ces nanotunnels, la découverte de ce rôle déterminant de la microglie dans le maintien de la santé neuronale va inspirer de nouveaux traitements : en transférant des mitochondries fonctionnelles, il serait possible de préserver la santé neuronale et de ralentir la progression de la neurodégénérescence.
Des thérapies géniques en vue ? Les chercheurs ont en effet regardé si des mutations génétiques connues associées aux maladies neurodégénératives pouvaient influencer la formation de ces nanotubes et les mécanismes de « sauvetage » permis par ces nanotubes. Des mutations des gènes LRRK2 et Trem2 apparaissent alors respectivement liées à la maladie de Parkinson et à la démence frontotemporale, elles réduisent l’élimination des agrégats ou compromettent la livraison de mitochondries fonctionnelles. Des altérations liées à la maladie de Parkinson dans le gène Rac1 semblent également affecter la formation et le fonctionnement de ces nanotunnels.
- En perturbant les mécanismes neuroprotecteurs médiés par ces nanotunnels, ces variantes génétiques empêchent la microglie de soutenir efficacement les neurones. Le ciblage de ces gènes constitue donc une voie possible pour activer le transfert via ces nanotubes et atténuer la progression de certaines maladies neurodégénératives.
Ces travaux apportent une nouvelle compréhension de la communication intercellulaire à travers les nanotubes et révèlent donc un mécanisme neuroprotecteur avec la perspective de nouvelles stratégies thérapeutiques contre la neurodégénérescence.
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