KÉTAMINE : Une piste thérapeutique prometteuse dans le trauma cérébral de l’enfant
La kétamine, une substance anesthésique et psychotrope pourrait être bénéfique pour le traitement des lésions cérébrales chez les enfants, conclut cette étude menée au Centre médical de l'Université Vanderbilt (Nashville). Publiées dans Critical Care Medicine, les conclusions confirment les promesses de l’anesthésique à réduire la pression intracrânienne chez ces enfants atteints de lésions cérébrales traumatiques.
L’auteur principal, le Dr Michael Wolf, professeur de pédiatrie et de chirurgie neurologique et directeur des soins neurocritiques à l'hôpital pour enfants Monroe Carell Jr. à Vanderbilt, rappelle que la kétamine est un médicament utilisé pour l'anesthésie depuis les années 70 et a déjà utilisée en clinique, pour traiter les troubles de l'humeur et la dépression sévère.
De nombreuses recherches sur le potentiel du médicament en tant que traitement de la dépression et antidote aux pensées suicidaires ont déjà été publiées et en 2019, l’Agence américaine FDA a approuvé l'esketamine en spray intranasal, dérivée de la kétamine, à utiliser en association avec un dépresseur oral chez les adultes souffrant de dépression résistante au traitement.
On sait que la kétamine modifie clairement le fonctionnement d'importants systèmes de neurotransmetteurs dans de nombreuses zones clés du cerveau. Ainsi, la kétamine modifie la libération de glutamate qui régule une grande partie du système nerveux et aide le cerveau à se recâbler en créant de nouvelles connexions.
Jusque-là, la kétamine était évitée en cas de lésions cérébrales traumatiques en raison de précédentes études ayant suggéré que la substance pourrait augmenter la pression intracrânienne (PIC).
Et si la substance réduisait la pression intracrânienne ?
Des études plus récentes l’ont suggéré, rappelle l'auteur principal Michael Wolf, qui, avec son équipe a entrepris de réexaminer les effets de la kétamine sur la pression intracrânienne chez 33 enfants, âgés de 1 mois à 16 ans, admis en l'unité de soins intensifs pédiatriques (USIP) avec un trauma sévère, et dont 22 ont reçu de la kétamine comme dans le cadre d'un protocole de traitement éclairé par des lignes directrices fondées sur la preuve. 18 doses de kétamine ont ainsi été administrées pendant les crises de PIC chez 11 patients, et une diminution globale de la PIC a été observée :
« Non seulement la kétamine n'augmente pas la PIC, mais dans certains cas, elle peut même l'abaisser ».
Alors que les enfants atteints de traumatisme crânien grave risquent de mourir ou de souffrir à long terme de troubles neurologiques, comme des difficultés à marcher et à parler, pouvoir minimiser les dommages au cerveau, dans les jours mêmes qui suivent la lésion initiale, tout en évitant l’élévation de la PIC, constitue un grand espoir. Par ailleurs, les options de traitement restent limitées à une poignée de médicaments et de techniques.
L’étude ouvre une nouvelle voie, à partir d’un ancien médicament bien connu, avec des résultats ici qualifiés « d’excitants, bien que préliminaires ». Mais si ces données étaient reproduites dans une étude plus vaste, la kétamine pourrait être envisagée comme traitement de l'hypertension intracrânienne chez les enfants atteints de trauma sévère.
Enfin, "ces résultats inversent près de 20 années de réflexion sur la kétamine et la pression intracrânienne et sensibilisent à l’importance et aux progrès déjà accomplis mais aussi des progrès futurs des soins neurocritiques pédiatriques ».
« Cette étude représente à elle seule
un renversement presque complet de notre façon de penser la relation entre la kétamine et la pression intracrânienne.
Les résultats conduiront probablement à d'autres études qui, je pense, changeront 20 ans de réflexion passée ».
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