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L’ANESTHÉSIE qui contrôle l’inconscient précisément

Actualité publiée il y a 10 mois 4 semaines 1 jour
PNAS Nexus
Cette nouvelle technologie d'anesthésie, nommée CLAD pour closed-loop anesthesia delivery est capable de contrôler avec précision l'inconscience du sujet opéré (Visuel Adobe Stock 596763795)

Cette nouvelle technologie d'anesthésie, nommée CLAD pour closed-loop anesthesia delivery est capable de contrôler avec précision l'inconscience du sujet opéré. Ce système avancé d'administration d'anesthésie en boucle fermée, développé à l’Institut Picower du MIT (Massachusetts Institute of Technology) surveille l'état du cerveau pour adapter la dose de propofol et atteindre exactement le niveau d'inconscience souhaité. La technologie, testée ici chez l'animal, et présentée dans les Actes de l’Académie des Sciences américaine « Nexus » promet également de réduire considérablement les effets secondaires postopératoires.

 

L’auteur principal, Emery N. Brown du Picower Institute for Learning and Memory rappelle le concept de base de ce développement : permettre aux anesthésistes de gérer le dosage, afin d’administrer moins de médicament mais en maintenant exactement la bonne profondeur d'inconscience permettrait aussi de réduire les effets secondaires cognitifs postopératoires pour les patients, notamment les plus fragiles, comme les personnes âgées.

 

« Améliorer les soins d'anesthésie consiste à pouvoir administrer juste la bonne quantité de médicament », précise l’auteur, professeur de génie médical et de neurosciences au MIT.

 

Actuellement, en salle d'opération, l'état cérébral des patients est surveillé à l'aide d'électroencéphalogrammes (EEG). Le dosage est ajusté en fonction de ces données, ce qui peut d’ailleurs déjà permettre de réduire de moitié la quantité de médicament utilisée par rapport à un simple débit de perfusion constant. Ce dernier protocole reste assez courant alors que la plupart des anesthésistes ne sont pas formés à suivre les états cérébraux et à ajuster les dosages en fonction.

Le défi consiste toujours à maintenir les patients anesthésiés « stables »

dans un état inconscient et de ne pas risquer un retour à l’état de conscience durant l’intervention.

Pour relever ce défi, l’équipe du Picower a développé, avec l’aide de collègues du Massachusetts General Hospital (MGH) un système en boucle fermée basé sur la surveillance de l'état du cerveau qui contrôle avec précision l'inconscience et automatise en fonction les doses de propofol, toutes les 20 secondes.

 

Le nouveau système n'est pas le premier système d'administration d'anesthésie en boucle fermée (CLAD) mais il est sans aucun doute le plus avancé. Alors que les autres systèmes CLAD automatisent simplement un débit de perfusion constant, ajusté en fonction des caractéristiques du patient (taille, poids et âge) et n’exploitent aucune donnée sur les niveaux d'inconscience, le nouveau système permet une gestion très précise de l'inconscience : il évalue cet état à partir de données du cerveau.

 

Des tests menés sur 2 grands modèles animaux apportent une première preuve de concept de sa stabilité et de son efficacité : le système semble ainsi permettre plus de 18 heures de contrôle précis de la conscience au cours de 9 séances d’anesthésie sur ces 2 modèles animaux.

 

Comment ça marche ? L’un des fondements de la technologie réside dans la lecture physiologique de l’inconscience à partir du cerveau (et non sur des marqueurs indirects tels que la fréquence cardiaque, la pression artérielle et l’immobilité). Les chercheurs ont établi leur marqueur cérébral en mesurant les changements dans l'activité neuronale au milieu de l’état d'inconscience chez les animaux. Un modèle de la pharmacocinétique et de la pharmacodynamique du propofol, intégré au système, détermine la quantité de médicament nécessaire pour modifier la conscience et la rapidité avec laquelle une dose donnée aura cet effet. Ce modèle couplé avec le marqueur cérébral d'inconscience permet d’ajuster la délivrance du médicament pour chaque sujet.

 

En d’autres termes, plutôt que de maintenir une dose de médicament préalablement adaptée au sujet, le nouveau système maintient automatiquement le niveau d’inconscience souhaité

en mettant à jour cette dose toutes les 20 secondes.

Le nouveau système évite ainsi l’écueil du surdosage, de la pratique courante basée sur un débit de perfusion constant.

 

Les scientifiques précisent qu’il reste à parcourir un long chemin pour faire progresser la technologie jusqu’à son utilisation clinique. Enfin, l’équipe souhaite étendre les capacités du système afin qu’il maintienne non seulement l’inconscience, mais qu’il contribue également à l’induire et à ramener les patients à l’éveil.