MUCOVISCIDOSE : L’édition du génome pour remplacer des gènes défectueux entiers
Ce nouvel outil, développé au Massachusetts Institute of Technology (MIT) basé sur l’édition de gènes CRISPR, est capable d’insérer de grandes séquences d'ADN aux sites souhaités dans les cellules et a donc la capacité de traiter une grande variété de maladies causées par des gènes « longs » défectueux portant un grand nombre de mutations. Connue sous le nom de « PASTE » pour Programmable Addition via Site-specific Targeting Eléments et documentée dans la revue Nature Biotechnology, la technique trouve notamment une application plus immédiate dans le traitement de la mucoviscidose.
En utilisant ce système, les chercheurs de Cambridge montrent qu’ils peuvent ainsi délivrer des gènes aussi longs que 36.000 paires de bases d'ADN à plusieurs types de cellules humaines. La preuve de concept est également apportée in vivo, chez des souris. L’un des auteurs principaux, Omar Abudayyeh, chercheur au McGovern Institute for Brain Research du MIT résume le principe : « C'est une nouvelle façon génétique de cibler ces maladies très difficiles à traiter. Nous nous concentrons sur ce que la thérapie génique était censée faire à ses débuts, c'est-à-dire remplacer les gènes, et pas seulement corriger des mutations spécifiques ».
Remplacer des gènes longs et défectueux entiers
Le nouvel outil combine le ciblage précis de CRISPR-Cas9 et un ensemble d’enzymes intégrases, que les virus utilisent pour insérer leur propre matériel génétique dans un génome bactérien.Tout comme CRISPR, ces intégrases sont issues de la lutte entre les bactéries et les virus qui les infectent. En d’autres termes les scientifiques exploitent ici des mécanismes naturels pour en faire de nouveaux outils.
Comment « ça marche » ? Le système d'édition de gènes CRISPR-Cas9 se compose d'une enzyme coupant l'ADN appelée Cas9 et d'un court brin d'ARN qui guide l'enzyme vers une zone spécifique du génome, dirigeant Cas9 où faire sa coupe. Lorsque Cas9 et l'ARN guide ciblant un gène précis de la maladie sont délivrés dans les cellules, une coupe spécifique est faite dans le génome, et les processus de réparation de l'ADN des cellules collent la coupe ensemble, supprimant souvent une petite partie du génome.
Si une matrice d'ADN est également délivrée, les cellules peuvent incorporer une copie corrigée dans leurs génomes pendant le processus de réparation. Cependant, ce processus oblige les cellules à faire des cassures double brin dans leur ADN, ce qui peut entraîner des délétions ou des réarrangements chromosomiques nocifs pour les cellules. Une autre limitation est que ce processus ne peut fonctionner que dans les cellules qui se divisent, car les cellules qui ne se divisent pas n'ont pas de processus actifs de réparation de l'ADN.
Pas de cassure de l'ADN : l’objectif était bien de découper un gène défectueux entier et de le remplacer par un nouveau sans induire de cassure de l'ADN double brin. C’est pour atteindre cet objectif, que les scientifiques se tournent ici vers cette famille d'enzymes appelées intégrases, que des virus appelés bactériophages utilisent pour s'insérer dans les génomes bactériens. Les chercheurs utilisent précisément « des intégrases à sérine », des enzymes capables d’insérer d'énormes morceaux d'ADN, pouvant atteindre 50.000 paires de bases. Ces enzymes ciblent des séquences génomiques spécifiques appelées sites de fixation, s'y lient et intègrent leur cargaison d'ADN.
La combinaison de ces enzymes avec un système CRISPR-Cas9, un outil nommé PASTE (Programmable Addition via Site-specific Targeting Elements) constitue un système d'insertion génique puissant et précis capable de cibler n'importe quel site du génome pour insérer in grand nombre de paires de bases d'ADN. Cette insertion peut se faire sans introduire de cassure double brin.
Des applications en vue : l’équipe montre que PASTE permet d’insérer des gènes dans plusieurs types de cellules humaines, notamment les cellules hépatiques, les cellules T et les lymphoblastes (globules blancs immatures), à de nombreux sites du génome, avec un taux de réussite allant de 5 à 60 %.
Les chercheurs explorent maintenant l’application de cet outil comme moyen possible de remplacer le gène défectueux de la mucoviscidose. Cette technique pourrait également être utile pour traiter les maladies du sang causées par des gènes défectueux, comme l'hémophilie et le déficit en G6PD, ou la maladie de Huntington, un trouble neurologique causé par un gène défectueux qui a trop de répétitions de gène.