MUSCLE : Le succinate, la petite molécule qui l’adapte à l’exercice
La découverte du rôle clé de cette molécule qui régule l'adaptation musculaire à l'exercice va modifier la compréhension d’un grand nombre de maladies musculaires : l’équipe de la São Paulo Research Foundation (FAPESP) montre ainsi que le métabolite succinate, libéré par les cellules musculaires pendant l'exercice physique, déclenche tout un processus de remodelage tissulaire qui renforce les muscles et améliore l'efficacité métabolique. Ces travaux présentés dans la revue Cell, qui décryptent l’ensemble du processus déclenché par la molécule, incitent à regarder comment ce même mécanisme est perturbé dans les maladies caractérisées par des altérations du métabolisme énergétique.
Le début de tout programme d'exercice physique provoque des douleurs musculaires qui peuvent entraver des mouvements aussi simples que de se lever d'un canapé. Mais, avec le temps, les courbatures disparaissent et les muscles s'habituent à l'effort, développant plus de force et d'endurance. Cette équipe de chercheurs de l'Université de São Paulo (USP) avec des collègues de l'Université Harvard, décrit le rôle de ce médiateur cellulaire qui rend possible cette adaptation à l'exercice.
Un précieux médiateur entre l’exercice et le muscle
Ce médiateur est le succinate, un métabolite connu jusqu'à présent uniquement pour sa participation à la respiration mitochondriale. « Notre étude montre que le succinate quitte les cellules musculaires pendant l'exercice et envoie à leurs voisines des signaux qui induisent un processus de remodelage des tissus musculaires », résume l’auteur principal, Julio Cesar Batista Ferreira, professeur à l'Institut des sciences biomédicales (ICB) de l'USP. Les motoneurones créent de nouvelles ramifications, les fibres musculaires deviennent plus uniformes pour gagner en force lors de la contraction, et l'absorption de sucre dans le sang augmente dans toutes les cellules pour produire de l'adénosine triphosphate (ATP).
Comment le muscle augmente en efficacité :
Les chercheurs mènent ici toute une série d’expériences chez l’animal et avec la participation de volontaires humains.
- Une expérience, chez la souris, a consisté à comparer plus de 500 métabolites présents dans les muscles des jambes de souris avant et après une course sur un tapis roulant jusqu'à épuisement : les chercheurs observent une augmentation significative du succinate uniquement dans les fibres musculaires et les espaces interstitiels.
- Un phénomène similaire est observé chez des volontaires en bonne santé âgés de 25 à 35 ans au cours de 60 minutes d'exercice intense sur vélo stationnaire. L’analyse de prélèvements de sang montre une augmentation spectaculaire des taux de succinate après l’exercice. Ces taux diminuent ensuite progressivement durant la récupération.
Le succinate, une des réponses au stress cellulaire: les chercheurs concluent en effet que les cellules musculaires libèrent du succinate en réponse au stress causé par l'exercice. Cependant l'analyse du sang des participants apporte un autre indice: un autre composé a augmenté avec l'exercice, le lactate (la forme ionisée de l'acide lactique), signe que les cellules ont activé leur système de génération d'énergie « d'urgence ». Ainsi, c’est lorsque la demande d'énergie augmente fortement et que les mitochondries ne peuvent pas suivre le rythme, que le système anaérobie est activé, provoquant une formation excessive de lactate et une acidification cellulaire.
L’acide lactique, l’autre réponse au stress cellulaire : ce changement de pH provoque un changement dans la structure chimique du succinate qui devient capable de passer à travers la membrane et de s'échapper dans le milieu extracellulaire. Les chercheurs identifient ici, par protéomique, la protéine de transport qui aide le succinate à sortir de la cellule : la protéine MCT1 augmente dans le tissu musculaire après l'exercice. MCT1 est une protéine spécialisée déjà impliquée dans le transport du monocarboxylate hors de la cellule. Une autre expérience impliquant des cellules germinales (ovocytes) de grenouilles génétiquement modifiées pour exprimer la protéine humaine MCT1 montre que les ovocytes ne libèrent du succinate que lorsqu'ils sont placés en milieu acide. L'acidité permet au succinate de suivre un processus chimique qui lui permet de se lier à la protéine MCT1 et de passer à travers la membrane dans le milieu extracellulaire.
Ces travaux sont les premiers à décrypter le rôle clé du succinate dans le tissu musculaire, c'est-à-dire son rôle dans la signalisation de cellule à cellule pour alerter les cellules voisines qu'elles doivent modifier leurs processus internes pour s'adapter à à l’effort.
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