OBÉSITÉ : Taxer ou ne pas taxer ?
La lutte contre l'obésité est la grande priorité de Santé publique et la taxation de certains aliments ou boissons trop riches en graisses ou en sucres fait partie de l’arsenal des mesures possibles pour endiguer « l’épidémie ». Toute mesure est « bonne » à tester en regard de l’augmentation de la prévalence du surpoids et de l’obésité, soit 38% dans le monde ! Un débat « pour ou contre » cette taxation qui se déroule à la Conférence annuelle de la Society for Endocrinology (Harrogate, UK) explore si la fiscalité alimentaire est une stratégie indispensable dans la lutte contre l'obésité, ou si d'autres mesures devraient lui être substituées.
Comme en France, le débat se poursuit au Royaume-Uni, où, ces vingt dernières années, la prévalence de l'obésité a presque doublé, avec 80% plus de cas en 2016 vs 1993. L’obésité, on le sait, obère la qualité de vie de multiples façons, via ses comorbidités dont le diabète de type 2 et les maladies cardiovasculaires et ses implications sociales notamment la discrimination et le chômage. L’obésité constitue un fardeau économique autant qu’humain, et les taxes sur les boissons ou les aliments jugés malsains constituent une réponse a priori logique et une mesure possible pour promouvoir des régimes alimentaires plus sains et finalement réduire l'impact économique de l'obésité.
Deux experts s’affrontent ici sur le sujet :
- Le Pr Roy Taylor, professeur de médecine et métabolisme à l'Université de Newcastle et médecin-conseil honoraire qui la taxation des aliments malsains comme cruciale pour résoudre le problème de l'obésité. Les taxes alimentaires vont sensibiliser aux coûts personnels négatifs de la consommation de certains aliments et en incitant les consommateurs à identifier, à payer plus cher et ainsi à éviter les produits alimentaires contribuant à l'obésité, vont les inciter à se tourner vers des choix alimentaires plus sains. Idem pour les industriels alors incités à développer et promouvoir des options alimentaires plus saines. Le Pr Taylor fait référence à l’expérience menée actuellement dans les hôpitaux du NHS qui vise à limiter la teneur en calories des collations des patients afin de modifier leurs habitudes d'achat et alimentaires.
- Le Dr Tahrani, clinicien-chercheur du NIHR et endocrinologue consultant honoraire à l'Université de Birmingham soutient que se concentrer sur la fiscalité alimentaire est trop simpliste et néglige d’autres facteurs majeurs de développement de l'obésité. Son discours est fondé sur les interactions génétiques et environnementales qui influencent un autre facteur de base : l'équilibre entre l'apport énergétique et la dépense énergétique. La lutte contre l’obésité devrait se recentrer sur la prédisposition génétique, la psychologie individuelle, les influences sociétales et le mode de vie.
Des résultats ? Les experts soulignent que les initiatives de taxation des aliments menées dans différents pays n'ont pas encore donné de résultats significatifs et que la définition même de la taxe alimentaire reste bien ambiguë. Quels devraient être aliments admissibles à la taxe et quel serait l’impact sur les plus démunis ? Ils s’accordent sur le grand besoin d'éducation des consommateurs comme des professionnels de santé sur les causes et les traitements possibles de l'obésité. Ainsi, si même la fiscalité pouvait entraîner un effet bénéfique, ce ne serait qu’un outil de lutte parmi tant d’autres et à condition de mieux comprendre le comportement des patients en surpoids et obèses.
Rappelons, pour la France, le vote récent de la modulation de la « taxe soda » en fonction du taux de sucre, à partir de 5 g de sucre pour 100 mL qui vise notamment à inciter les industriels à réduire les taux de sucre dans les boissons.
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