OBÉSITÉ : Une affaire de société ?
Cette déclaration de consensus clinique de l'European Society of Cardiology, centrée sur l'obésité et les maladies cardiovasculaires, non seulement apporte une photographie réactualisée de l'épidémiologie galopante et de l'étiologie multiple de l'obésité mais aussi des dernières recommandations de prise en charge clinique de ces patients obèses atteints de maladies cardiovasculaires (MCV).
Au-delà de rappeler les bases fondamentales pour les politiques et stratégies sanitaires, ces données alertent et sensibilisent, à nouveau, l’ensemble des professionnels de santé à lutter de manière plus proactive contre ce fléau chez leurs patients.
Ainsi, dans la déclaration, ne sont pas en reste les stratégies de perte de poids, notamment les changements de mode de vie, les procédures interventionnelles et les médicaments anti-obésité qui ont aussi leur impact sur le risque cardiométabolique et les résultats cardiaques.
Il convient en effet de rappeler que :
la prévalence mondiale de l’obésité a plus que doublé au cours de ces 40 dernières années,
touchant aujourd’hui plus d’un milliard de personnes dans le monde. Au-delà de sa reconnaissance comme une maladie à haut risque de comorbidités chroniques, l’obésité entraîne en soi une altération de la qualité de vie et une réduction de l’espérance de vie. Cependant, la mortalité liée aux maladies cardiovasculaires est particulièrement préoccupante.
L’un des auteurs principaux, le professeur Emeline Van Craenenbroeck, coprésidente de la déclaration de consensus, chercheur et médecin à l’hôpital universitaire d’Anvers (Belgique) précise : « 67,5 % des décès liés à un IMC élevé sont imputables à une MCV. En dépit de la reconnaissance croissante des patients de ce lien entre l’obésité et un large éventail de maladies cardiovasculaires, notamment l’athérosclérose, l’insuffisance cardiaque, la maladie thromboembolique, les arythmies et la mort cardiaque subite,
l’obésité reste sous-estimée comme « facteur majeur de risque cardiovasculaire modifiable ».
Ainsi, si l’obésité touche différents organes et constitue un facteur de risque pour plusieurs maladies chroniques, la déclaration décrypte comment :
- l’obésité contribue non seulement à des facteurs de risque cardiovasculaire, dont le diabète de type 2, la dyslipidémie, l’hypertension artérielle ;
- l’obésité a également des effets indésirables directs sur la structure et la fonction cardiaques, ce qui favorise aussi le développement de maladies cardiovasculaires.
En matière d’obésité, les facteurs environnementaux ou de mode de vie « priment » : Si l’obésité a bien une composante génétique et biologique, l’épidémie mondiale d’obésité est bien, en grande partie, le résultat de facteurs environnementaux/sociétaux.
En matière d’obésité, l’IMC ne suffit pas à l’évaluation : des patients ayant un IMC similaire peuvent avoir un risque cardiométabolique différent. D’autres mesures de l’adiposité abdominale, notamment le tour de taille, le rapport taille/hauteur et le rapport taille/hanches, sont utiles pour affiner la stratification du risque cardiométabolique au-delà de l’IMC.
Sa première comorbidité reste le diabète de type 2 : obésité et diabète sont en effet étroitement liés :
- environ 80 à 85 % des personnes atteintes de diabète de type 2 sont en surpoids ou obèses ;
- à l’inverse, les personnes obèses sont près de 3 fois plus susceptibles de développer un diabète de type 2 vs les personnes de poids normal ;
- chez les patients atteints de diabète de type 2, les interventions de perte de poids ont montré des effets positifs sur le contrôle glycémique, dont la rémission du diabète.
IMC élevé : 2 tiers des décès sont liés aux MVC
La relation « mortelle » entre l’obésité et les maladies cardiovasculaires, notamment la fibrillation auriculaire, les maladies cardiovasculaires athéroscléreuses, l’insuffisance cardiaque, les arythmies, la thromboembolie veineuse et les maladies valvulaires est très préoccupante et largement abordée dans la déclaration :
- l’obésité et/ou un IMC élevé restent ainsi responsables de 78 % du risque d’hypertension chez les hommes et de 65 % du risque chez les femmes âgées de 20 à 49 ans.
Cependant l’obésité est à la fois évitable et traitable
Son traitement repose sur des approches multidisciplinaires comprenant :
- des interventions comportementales notamment la nutrition, l’activité physique,
- les médicaments de perte de poids, comme les agonistes du GLP-1, qui sont aujourd’hui démontrés comme efficaces à la fois pour la perte de poids et la réduction des facteurs de risque cardiovasculaire ;
- la chirurgie bariatrique.
Et du côté des régimes ? Parmi les interventions diététiques clés, on trouve la restriction, ou un déficit énergétique de 500 à 750 kcal/jour, cependant ce type de régime doit être adapté au poids corporel et à l'activité de chaque individu. Ces approches nutritionnelles permettent de maintenir une perte de poids de 10 %. Les interventions sous forme d'activité physique ont généralement des effets plus modestes mais participent au maintien de la perte de poids et à la réduction du risque cardiovasculaire.
Les auteurs concluent : « Il est peu probable que le problème mondial de l’obésité soit résolu par des interventions médicales, de mode de vie ou autres, ciblées sur les patients souffrant d’obésité. La vraie lutte contre l’épidémie d’obésité passe par de profonds changements sociétaux et de mode de vie et donc par des politiques de santé publique efficaces.
Les médecins dont les cardiologues, mais plus largement tous les professionnels de santé peuvent contribuer à la lutte contre l’obésité en se montrant (plus) proactifs dans la prévention et la gestion de l’obésité chez leurs patients, comme ils le sont depuis longtemps avec les facteurs de risque cardiovasculaire ».
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