SANTÉ PUBLIQUE : La moitié de la population mondiale n’a pas accès au diagnostic
Parmi les leçons de la pandémie COVID-19, l'importance cruciale d'un diagnostic précis et rapide mais aussi le manque d’accès généralisé, dans le monde, d'une telle capacité. Ainsi, près de la moitié de la population mondiale n'a pas accès aux diagnostics de base pour de nombreuses maladies courantes, conclut le rapport de ce groupe de 25 experts de la Lancet Commission on Diagnostics. Une série d’études et d’articles viennent aujourd’hui dénoncer l'ampleur de l'écart de cet accès au diagnostic, laissant une personne sur 2 dans le monde, à risque élevé de soins de santé de mauvaise qualité ou de traitement inadapté.
Sans un accès amélioré aux tests et services de diagnostic clés, les deux grandes priorités de santé publique mondiale, notamment la lutte contre les pandémies virales ou contre la résistance aux antimicrobiens ne pourront pas atteindre leurs objectifs.
47 % de la population mondiale a un accès limité aux tests diagnostiques clés
Le diagnostic, un des 3 piliers de la santé publique : les experts soulignent les 3 conditions d’une bonne qualité de soins de santé :
- la sécurité du diagnostic,
- la sécurité des vaccins,
- la sécurité thérapeutique.
Ainsi, plus récemment, lors de l’émergence de l’épidémie de COVID-19, l’absence de tests a entravé la réponse à la pandémie mais a aussi favorisé l'émergence et la commercialisation de tests peu fiables. Dans de nombreux pays à revenu faible et intermédiaire n'ayant pas accès à l’infrastructure et aux dispositifs de diagnostic, les mesures d’isolement, de traçage et de traitement n’ont pas pu être mises en œuvre.
Des tests clés sont nécessaires à l’évaluation de la santé globale du patient. Ils comprennent les analyses de sang, de tissus ou d'urine au chevet du patient ou en laboratoire, l’imagerie diagnostique telle que les rayons X, l'échographie, l'IRM, la tomodensitométrie ou encore la médecine nucléaire. Les tests de syphilis, par bandelettes urinaires, les tests d'hémoglobine, les tests de glycémie et les échographies, sont des tests particulièrement essentiels qui devraient être disponibles à 2 heures maximum de trajet pour le patient. Ces tests clés permettent le diagnostic des maladies les plus courantes, le diabète, l'hypertension (HTA), le VIH et la tuberculose, ou pour le suivi de la grossesse et plus largement de la santé reproductive. Sans accès à ces tests, de nombreuses personnes ne seront pas traitées et d’autres seront surtraitées et exposées à un traitement inutile et dangereux.
Une médecine toujours à l'aveugle dans de nombreuses régions du monde : « Dans une grande partie du monde, les patients reçoivent des traitements sans avoir eu préalablement accès aux tests et aux services de diagnostic de base. Non seulement, cela induit des dangers pour les patients, mais aussi un gaspillage important de ressources médicales".
Cette étude des données internationales sur les équipements et l’accès aux diagnostics dans le monde, montre que :
- 47 % de la population mondiale a un accès limité aux tests diagnostiques clés
- l’écart de diagnostic est le plus grand important dans les soins primaires ;
- seulement 19 % environ des populations des pays à revenu faible et intermédiaire inférieur ont accès aux tests de diagnostic les plus simples (autres que pour le VIH ou le paludisme) ;
Des recommandations pour un meilleur accès au diagnostic :
- Investir et former des techniciens en particulier pour améliorer l'accès aux tests primaires : la disponibilité de personnel qualifié est l’une des clés pour réduire l’écart et les experts estiment qu'il y aurait aujourd’hui un déficit global de jusqu'à 1 million de personnels de diagnostic ;
- réduire l'écart de diagnostic en priorité pour 6 maladies, le diabète, l’hypertension, le VIH, la tuberculose et l'hépatite B et la syphilis pour les femmes enceintes, de 35-62 % à 10 % : cette amélioration de l’accès au diagnostic pour ces maladies permettrait de réduire de plus de 1 million, le nombre annuel de décès prématurés dans les pays à revenus faibles et intermédiaires ;
- développer des stratégies nationales de diagnostic fondées sur l'accès des populations à un ensemble de diagnostics essentiels adaptés aux besoins locaux en matière de soins de santé ;
- élargir la production de diagnostics : si durant ces 15 dernières années, l’industrie du diagnostic a considérablement progressé, elle s’est aussi considérablement concentrée : 4 grandes entreprises aux États-Unis et en Europe représentent la moitié de l'offre mondiale de diagnostics in vitro, tandis que 4 entreprises représentent les trois quarts de l'offre mondiale d'imagerie.
« La pandémie de COVID-19 a illustré les risques liés à la concentration de l’offre »
- Travailler à des conditions donc abordables pour les pays en développement ;
- améliorer les cadres réglementaires pour la qualité et la sécurité des diagnostics ;
- aller vers une démocratisation des diagnostics (autotests et home-tests).
« La pandémie de COVID-19 a illustré ce besoin rapide de capacités de diagnostic et de tests mais aussi les inégalités et les lacunes en particulier dans les pays où ces capacités sont le plus nécessaires. La pandémie a soulevé ainsi le spectre hideux du nationalisme en réaction à une urgence mondiale… Consacrer plus d'attention au diagnostic en tant qu'élément fondamental des systèmes de santé permettra de renforcer la préparation à la lutte contre les futures pandémies, mais sera également d'une importance cruciale pour la prévention générale des maladies, pour l’amélioration de la qualité des soins et des résultats de santé à l'échelle mondiale ».
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