AXE INTESTIN-CERVEAU : 3 acides gras qui augmentent le risque d'Alzheimer
Cette équipe de neurologues et gastroentérologues de la Washington University School of Medicine à St. Louis, décrypte encore un peu plus comment les bactéries intestinales affectent la santé du cerveau. L'étude, menée sur la souris et publiée dans la revue Science, suggère une nouvelle approche pour traiter la maladie d'Alzheimer et d'autres maladies neurodégénératives.
Un nombre croissant de preuves impliquent cet axe intestin-cerveau soit les effets remarquables des milliards microbes qui vivent dans nos intestins ou microbiome intestinal sur le fonctionnement du corps et du cerveau. Des preuves s'accumulent également sur les différences entre les microbiomes intestinaux de patients atteintes de la maladie d'Alzheimer et de personnes en bonne santé. On ignore cependant si ces différences sont la cause ou le résultat de la maladie et quel effet la modification du microbiome pourrait avoir sur l'évolution de la maladie.
Les bactéries intestinales, notamment en produisant ces acides gras à chaîne courte, affectent le comportement des cellules immunitaires du cerveau
Les micro-organismes de cette communauté microbienne produisent des vitamines, nous aident à digérer les aliments, empêchent la prolifération de bactéries nocives et régulent le système immunitaire, entre autres fonctions bénéfiques. Cette étude s’attache à décrypter le rôle clé du microbiome intestinal dans la santé du cerveau.
L'étude révèle que les bactéries intestinales, notamment en produisant des composés tels que les acides gras à chaîne courte, affectent le comportement des cellules immunitaires dans tout le corps, y compris les cellules immunitaires du cerveau qui peuvent, dans certains cas, endommager les tissus cérébraux et exacerber la neurodégénérescence donc mener à la maladie d'Alzheimer entre autres maladies.
Des souris porteuses de la variante APOE4
Afin de regarder si le microbiome intestinal peut jouer un rôle causal, les chercheurs ont modifié les microbiomes intestinaux de souris prédisposées à développer des lésions cérébrales et des troubles cognitifs de type Alzheimer. Les souris ont été génétiquement modifiées pour exprimer une forme mutante de la protéine tau qui s'accumule et cause des dommages aux neurones et une atrophie de leur cerveau à l'âge de 9 mois. Les animaux étaient porteurs d’une variante du gène humain APOE, un facteur de risque génétique majeur de maladie d'Alzheimer : les personnes portant une copie de la variante APOE4 sont 3 à 4 fois plus susceptibles de développer la maladie.
Les chercheurs ont administré des antibiotiques à un groupe de souris, à l’âge jeune, pendant une semaine seulement, et observent ensuite un changement permanent dans leurs microbiomes intestinaux, leurs réponses immunitaires et la neurodégénérescence liée à la protéine tau avec l'âge.
- Lorsque ces souris génétiquement modifiées ont été élevées dans des conditions stériles dès la naissance, elles n'ont pas acquis de microbiomes intestinaux et leur cerveau développe beaucoup moins de dommages à 40 semaines que le cerveau de souris hébergeant des microbiomes normaux ;
- Lorsque ces souris ont été élevées dans des conditions normales et non stériles, elles ont développé des microbiomes normaux. Cependant, une cure d'antibiotiques à l'âge de 2 semaines a modifié de façon permanente la composition des bactéries dans leurs microbiomes et également réduit la quantité de lésions cérébrales à l'âge de 40 semaines ;
- les effets protecteurs des modifications du microbiome s(‘avèrent plus prononcés chez les souris mâles porteuses de la variante APOE3 que chez celles portant la variante APOE4 à haut risque, peut-être parce que les effets délétères de l'APOE4 annulent une partie de la protection du microbiome ;
- à noter, le traitement antibiotique n'a aucun effet significatif sur la neurodégénérescence chez les souris femelles : « Nous savons déjà, selon des études sur les tumeurs cérébrales, que le cerveau et les cellules immunitaires des cerveaux masculins et féminins réagissent très différemment aux stimuli. Il n'est donc pas très surprenant que la manipulation du microbiome induise des réponses différentes selon les sexes ». Il faudra néanmoins poursuivre les investigations sur ce point.
L’auteur principal, le Dr David M. Holtzman, professeur de neurologie, commente ainsi ces résultats :
« Ce qui est excitant, c'est que la manipulation du microbiote intestinal pourrait être un moyen de traiter le cerveau sans rien lui administrer directement ».
3 acides gras spécifiques à chaîne courte, des composés métaboliques produits par certains types de bactéries intestinales sont identifiés comme associés à la neurodégénérescence :
- ces 3 acides gras sont rares chez les souris ayant eu leur microbiome intestinal modifié par un traitement antibiotique, et indétectables chez les souris sans microbiome intestinal ;
- ces 3 acides gras à chaîne courte déclenchent la neurodégénérescence en activant les cellules immunitaires dans le sang, qui à leur tour activent les cellules immunitaires du cerveau ce qui endommage les tissus cérébraux ;
- des souris d'âge moyen privées de microbiome et nourries avec ces 3 acides gras à chaîne courte, présentent des cellules immunitaires cérébrales plus actives et plus de signes de dommages liés à tau dans le cerveau.
C'est un nouvel éclairage sur la façon dont le microbiome influence la neurodégénérescence médiée par tau. L'étude suggère également des thérapies basées sur la modulation des microbiotes intestinaux pour prévenir et traiter les maladies neurodégénératives : modifier le microbiome intestinal avec des antibiotiques, des probiotiques -ou psychobiotiques, des régimes alimentaires spécialisés ou d'autres moyens dont la greffe de microbiote fécal.
Autres actualités sur le même thème
AUTISME : Pourquoi le risque est accru chez les hommes
Actualité publiée il y a 1 semaine 10 heuresCANCER : Un choc émotionnel pour toute la famille
Actualité publiée il y a 1 mois 2 semainesRÉGIME ALIMENTAIRE : Quelques écarts suffisent pour perdre la tête
Actualité publiée il y a 3 années 10 moisPOLYARTHRITE et SCHIZOPHRÉNIE : Des voies de signalisation identiques, mais en sens inverse
Actualité publiée il y a 7 années 9 mois