CANCER de la PROSTATE : De nombreux patients mettent en balance durée et qualité de vie et qualité de vie
On connaît la question des surdiagnostics et des surtraitements fréquents chez les patients atteints de cancer de la prostate et, associés aux biopsies et aux traitements, parfois superflus, les risques d’effets secondaires sévères. Les patients de mieux en mieux informés et conscients de ces effets indésirables regardent aujourd’hui de plus près les différentes options qui leur sont proposées avec un objectif qui apparaît majeur : éviter l’incontinence et l’impuissance, 2 effets indésirables liés à la chirurgie et la radiothérapie. Selon cette étude présentée à la Conférence 2018 du National Cancer Research Institute (NCRI), les patients récemment diagnostiqués d'un cancer de la prostate déclarent qu'ils échangeraient une partie de leurs chances de survie contre une réduction de ces effets secondaires et un maintien de leur qualité de vie.
Le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent chez l'homme mais, dans de nombreux cas, la maladie est à croissance lente, avec des chances de survie relativement bonnes, même en l’absence de traitement. Le traitement peut inclure une chirurgie ou une radiothérapie, ces 2 procédures peuvent provoquer une incontinence urinaire et une perte ou une dégradation de la fonction sexuelle. Certains patients vont avoir besoin de plusieurs mois pour récupérer leurs fonctions urinaire et sexuelle, d’autres vont avoir besoin d’un second traitement. Cette étude suggère que, si les patients espèrent bien évidemment une vie la plus longue possible, ils attachent également de l'importance à leur qualité de vie et ce facteur peut peser dans une décision qui se veut de mieux en mieux éclairée.
L’auteur principal, le Dr Hashim Ahmed, président et professeur d'urologie à l'Imperial College de Londres et président du groupe d'études cliniques sur le cancer de la prostate du NCRI explique : « Les hommes atteints d'un cancer de la prostate précoce doivent choisir entre une surveillance active, avec des bilans de santé réguliers, et un traitement plus invasif, tel que l'ablation de la prostate ou la radiothérapie. De précédentes recherches ont suggéré que :
- chez les hommes atteints d'un cancer de la prostate à faible risque, le traitement n’améliore pas la survie à 10 ans ;
- les hommes atteints d'un cancer de la prostate à risque élevé vont, avec le traitement, pouvoir espérer une augmentation de 5% de la survie à 10 ans ;
- chez les hommes présentant une maladie à risque moyen, l’incertitude pèse sur l’efficacité du traitement à prolonger la survie à 10 ans ».
La question des effets secondaires est essentielle car il s’agit notamment d’incontinence urinaire, nécessitant l'utilisation quotidienne de protections, de perte de la fonction érectile, malgré des médicaments comme le Viagra, et ces effets touchent à l’estime de soi et à la qualité de vie. De nombreux patients, touchés par ces effets à la suite du traitement, développent une dépression qui affecte sévèrement leur qualité de vie et leurs relations personnelles.
Ici, l’étude est menée auprès de 634 hommes avec diagnostic récent de cancer de la prostate, informés de leur diagnostic et ayant reçu des informations générales sur leur maladie et le traitements possible mais encore naïfs de traitement. Chez tous ces participants, le cancer ne s'était pas encore propagé. 74% présentaient un cancer à risque faible ou moyen, 26% un cancer à risque élevé. Les participants se sont vus proposer par leurs cliniciens 2 traitements différents en termes d’impact probable sur la survie, l’incontinence, l’impuissance, le temps de récupération et l’éventualité d’un traitement supplémentaire. Les participants devaient participer à la décision de traitement. Sur la base de leurs réponses, les chercheurs ont pu évaluer le poids de chaque facteur.
La survie reste le facteur le plus important, mais :
- le facteur durée de survie est suivi de près par la prévention du risque d'incontinence, l'absence de traitement supplémentaire et le maintien de la fonction érectile ;
- les patients se montrent disposés à faire des compromis entre les effets secondaires et la survie ;
- en moyenne, les patients sont disposés à renoncer à une amélioration de 0,68% des chances de survie à 10 ans en contrepartie d’une augmentation de 1% des chances de conserver leur continence ;
- en moyenne, les patients sont disposés à renoncer à une amélioration de 0,41% des chances de survie à 10 ans en contrepartie d'une augmentation de 1% des chances de ne pas avoir besoin de plus de traitement ;
- en moyenne, les patients sont disposés à renoncer à une amélioration de 0,28% des chances de survie à 10 ans en contrepartie d'une augmentation de 1% de pouvoir préserver leur fonction érectile.
Ainsi si la motivation principale du patient reste -logiquement- la survie, ces conclusions suggèrent une situation de plus en plus nuancée. Les hommes connaissent de mieux en mieux les enjeux et les effets indésirables des traitements et souhaitent éviter au maximum les effets secondaires, au point d’accepter un taux de survie plus faible pour garantir un risque d’effets secondaires lui-même faible.
Ainsi de nombreux patients mettent en balance quantité et qualité de vie, et ils ne doivent pas avoir le sentiment de « mal penser ».
« Je suis intéressé par les stratégies qui réduisent les dommages causés aux patients et limitent l'impact des traitements en termes d’effets secondaires impactant la qualité de vie. Pour beaucoup de patients, cela signifie opter pour une surveillance active ou des traitements moins invasifs », conclut l’auteur principal.
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