ENVIRONNEMENT : Mais pourquoi de nombreuses recherches ne sont pas médiatisées ?
La plupart des recherches sur les méfaits de certaines substances toxiques, ici les PFAS ne sont pas publiées, du moins au-delà de la communauté scientifique, dénonce cette équipe du Green Science Policy Institute (Berkeley, Californie) dans la revue Environmental Health. Bien que les per- et polyfluoroalkyles (PFAS) fassent quotidiennement la une des journaux, et c'est un exemple parmi tant d'autres, la plupart des preuves des liens entre l'exposition à ces substances et les dommages pour la santé humaine ne bénéficie que de peu de couverture médiatique. Pourquoi ? L'équipe répond à la question et exhorte les scientifiques à mieux médiatiser certains résultats auprès des politiques, mais aussi auprès du grand public.
Les PFAS sont un groupe de produits chimiques synthétiques présents dans les produits de consommation courante, notamment les vêtements, les cosmétiques, la peinture et les ustensiles de cuisine antiadhésifs. En raison de leur grande résistance à la dégradation, ces produits chimiques dits « éternels » s'accumulent dans la nature et chez l'Homme. Les aliments et l'eau potable contaminés sont les principales sources d'exposition aux PFAS. Aujourd’hui, chacun est ainsi exposé régulièrement et à long terme aux PFAS et on estime que plus des deux tiers des habitants des pays riches y sont exposés. Ces composés sont également retrouvés à des niveaux très élevés dans les poissons d'eau douce. Une étude récente a montré qu’1 enfant sur 5 présente des niveaux détectables de ces composés chimiques éternels, souvent supérieurs aux limites de sécurité…
« C'est dommage que seule une petite partie de cette science atteigne le public »,
déclare l'auteur principal, Rebecca Fuoco, directrice des communications scientifiques au Green Science Policy Institute : « De récentes études ont établi de fortes associations entre les produits chimiques éternels et des effets sévères comme la naissance prématurée et le cancer. Réserver ces recherches à la presse médicale et scientifique réduit leur portée".
L’étude est une méta-analyse de 273 études épidémiologiques évaluées par des pairs sur les impacts des PFAS sur la santé humaine et publiées sur la période 2018-2020. Parmi les articles faisant état d'une association statistiquement significative entre les PFAS et des effets sur la santé,
- les études ayant bénéficié d’un communiqué de presse lors de leur publication ont reçu 20 fois plus d'attention médiatique ;
- moins de 8% des études aboutissant pourtant à des résultats statistiquement significatifs ont fait l’objet d’un communiqué de presse ;
- les études non médiatisées faisant état de liens significatifs entre l'exposition aux PFAS et les risques de prématurité et de cancers, d'ostéoporose et de diabète gestationnel n’ont eu aucun impact sur le public ou via les réseaux sociaux.
Ces conclusions valent bien au-delà des PFAS et sur l’ensemble des sujets environnementaux voire scientifiques. Elles révèlent aussi que les chercheurs ont parfois une réticence à poursuivre la démarche au-delà des « communications savantes », réservées au milieu scientifique. Pourtant, soulignent les chercheurs, le public mérite d’être informé sur de nombreux domaines environnementaux ou sanitaires. Un autre obstacle est la crainte des scientifiques d’une couverture médiatique inexacte ou exagérée. Cependant, les communiqués de presse plus universitaires, donc plus rigoureux peuvent « faire l’affaire » et apporter un impact tout aussi conséquent. Cela suggère que les scientifiques jouent aussi un rôle plus actif dans la rédaction de ces communiqués et s'assurent de l’exactitude de leur couverture médiatique.
« Nous exhortons les scientifiques et leurs institutions à intégrer la sensibilisation des médias dans leur processus de recherche. En tant que scientifiques, nous détenons la clé de certaines données qui sont essentielles pour éclairer le public, mais aussi les politiques, les bonnes pratiques médicales, la démarche d’innovation de l'industrie, et plus encore. Il est de notre responsabilité de libérer ce potentiel en partageant nos recherches avec un public plus large ».
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