ÉPILEPSIE SUPER-RÉFRACTAIRE : Le régime cétogène confirmé comme une option efficace
Les dernières données permettent d’estimer que 30% des adultes atteints d'épilepsie sont résistants aux anti-épileptiques standards. Ce problème est critique pour les patients adultes qui souffrent de la forme la plus sévère d’épilepsie : cette forme relativement rare mais souvent mortelle est caractérisée par des crises prolongées qui nécessitent des comas médicalement induits pour préserver les patients de lésions encore plus sévères au corps et au cerveau. Or pour ces patients, le régime cétogène à teneur élevée en lipides et pauvre en glucides s’avère une option de traitement sûre et efficace, révèle ce petit essai clinique de phase I et II de la Johns Hopkins Médecine (Maryland). Les conclusions présentées dans la revue Neurology font en effet valoir, mais chez certains de ces patients seulement, une efficacité du régime à quasiment éliminer le statut épileptique et réduire considérablement la fréquence des crises.
On connait déjà bien l'efficacité du régime cétogènedans le traitement des patients atteints d'épilepsie. Au-delà, le lien entre le régime alimentaire et donc le métabolisme et l'activité du cerveau devient de mieux en mieux documenté, tout comme les thérapies qui consistent à cibler le métabolisme via le microbiote pour contrôler ou à inhiber certains des processus cérébraux.
Ce petit essai clinique de phase I et II permet de constater que l'efficacité du régime cétogène s'applique aussi dans cette forme rare d'épilepsie « hyper-réfractaire ». Ce régime est commenté comme « une option réalisable » pour ces patients atteints de la forme considérée comme la plus sévère d'épilepsie. Pour l'étude, l'équipe a recruté 15 patients, âgés de 18 à 82 ans, diagnostiqués avec épilepsie super-réfractaire à l'hôpital Johns Hopkins, à la Mayo Clinic, et autres centres spécialisés. 5 de ces patients étaient des hommes, 6 avaient des antécédents d'épilepsie avant le développement de cette forme hyper-réfractaire. Chez ces patients, et après plusieurs tentatives infructueuses de réduire la sévérité e la fréquence des crises par médicaments, les médecins utilisent des anesthésiques pour mettre le patient en coma artificiel, pour protéger ses muscles, ses reins, son corps et son cerveau de dommages encore plus sévères. Après 24 heures, le patient est réveillé pour vérifier si les crises reviennent. Si oui, alors les saisies sont considérées comme super-réfractaires. Ensuite, le médecin verra en fonction de l'histoire du patient car il n'y a pas de protocole de traitement standard. Dans l'essai, les participants avaient pris en moyenne 8 anti-épileptiques différents avant de passer au régime cétogène.
Le régime cétogène riche en graisses accélère le métabolisme des graisses du corps, comme pourrait le faire le jeûne, ce qui réduit l'excitabilité des cellules nerveuses dans le cerveau. Lorsque la plupart des calories ou de l'énergie proviennent de la graisse, le corps accumule des composés métabolites de la graisse, les cétones.
Dans l'essai, le régime cétogène consistait en une boisson nutritive composée de 4 unités de lipides pour 1 unité de glucides et 1 de protéines (en grammes). Chaque patient plongé en coma artificiel a reçu le régime par alimentation entérale, durant plus de 72 heures, les besoins caloriques ayant été calculés sur la base du poids. Après 72 heures d'alimentation artificielle, les médecins ont réduit progressivement les anesthésiques pour vérifier que les crises s'étaient arrêtées. En cas de non-récurrence, les patients ont continué à être alimentés par nutrition artificielle et par régime cétogène plusieurs jours jusqu'à pouvoir s'alimenter par eux-mêmes, et à ce stade sont passé au régime modifié Atkins, un régime alimentaire riche en graisses et pauvre en glucides. En cas de récurrence des crises, le patient poursuivait le régime alimentaire cétogène par voie artificielle et recevait en plus des anti-épileptiques.
-Après deux jours, tous les patients avaient des niveaux détectables de cétones, marqueurs du métabolisme de la graisse.
-Chez 79% des patients ayant achevé l'étude, les crises super-réfractaires ont cessé, et 8 patients ont totalement récupéré.
-5 des patients de l'étude sont décédés, dont un n'ayant pas achevé l'étude.
-10 patients ont présenté des effets indésirables dont la constipation, la perte de poids, une hypoglycémie, une hausse du taux de cholestérol et une baisse des niveaux de sodium dans le sang.
-Au final, 6 des 11 patients ayant achevé le régime cétogène à l'hôpital sont passés au régime Atkins modifié, plus facile à suivre que le régime cétogène. A 6 mois, pour ces 11 patients, 4 étaient toujours au régime Atkins modifié.
Certes d'autres recherches seront nécessaires pour adopter le régime cétogène comme part du traitement de cette forme grave de l'épilepsie. Mais cet essai démontre que le régime cétogène constitue bien une option efficace pour réduire la fréquence et la sévérité des crises chez certains patients. Des essais cliniques contrôlés randomisés de phase III sont donc déjà programmés.
February 8, 2017, doi:10.1212/WNL.0000000000003690: 1526-632X Phase I/II multicenter ketogenic diet study for adult superrefractory status epilepticus
Plus de 50 études sur l'Epilepsie
Lire aussi : ÉPILEPSIE et troubles neuros: Agir par le régime alimentaire –
Découvrir Microbiote blog
Les épilepsies chez l'Enfantinscrit et vous identifier
Autres actualités sur le même thème
ACUPUNCTURE : Elle conjure le risque d’AVC associé à la PR
Actualité publiée il y a 8 mois 1 semaineALZHEIMER : Les astrocytes à la rescousse
Actualité publiée il y a 5 années 7 moisOBÉSITÉ à l’ADOLESCENCE : La perturbation de l’appétit se lit dans le cerveau
Actualité publiée il y a 6 années 11 moisKÉTAMINE : Antidépresseur et régulateur des troubles de l’humeur ?
Actualité publiée il y a 5 années 5 mois