MICI : Et si la dysbiose remontait au tout début de la vie ?
Les maladies inflammatoires intestinales chroniques remontent peut-être au tout début de la vie, avec des expositions précoces, aux antibiotiques par exemple. A ce stade, le système immunitaire est encore en développement et il suffirait pratiquement d’une seule famille de bactéries pour corriger la dysbiose intestinale à vie. Cette équipe de gastroentérologues et de pédiatres de l’Université de Chicago révèle que les déséquilibres microbiens induits par une exposition précoce aux antibiotiques peuvent ainsi être corrigés en apportant une seule souche de Bacteroides pour réduire la dysbiose et prévenir la colite. Mais à une condition cependant, intervenir au tout début de la vie. La démonstration apportée dans la revue Gastroenterology, à ce stade chez l’animal, montre qu’un tout petit changement, au bon moment, peut avoir un effet considérable pour la santé et pour toute la vie. Mais au-delà, ces travaux incitent à situer l’apparition de ces maladies, beaucoup plus tôt dans la vie.
L’espèce microbienne « Bacteroides sp. CL1-UC (Bc) » apportée au microbiome intestinal à un moment clé du développement du système immunitaire peut ainsi prévenir la colite (inflammation du côlon) induite par les antibiotiques, ici chez la souris modèle. Sous réserve de confirmation, ces travaux rappellent l'impact à vie des expositions de la petite enfance et ont des implications majeures pour les humains souffrant de maladies inflammatoires chronique de l'intestin (MICI).
De précédentes études chez des patients humains ont montré que l'exposition précoce aux antibiotiques peut déséquilibrer le microbiome intestinal, provoquant une dysbiose ou un déséquilibre des populations microbiennes dans l'intestin, ce qui est corrélé à un risque accru de maladie inflammatoire de l’intestin et au risque d’autres problèmes de santé chez l’enfant. « Nous savons aujourd’hui que les types de microbes auxquels vous êtes exposé tôt dans la vie déterminent la manière dont se développe le système immunitaire », rappelle l'auteur principal, le Dr Eugene Chang, professeur de médecine à l’Université de Chicago : « Notre système immunitaire apprend à nous reconnaître à travers les milliards de microbes présents dans notre intestin, qu’il doit apprendre à tolérer tout comme il tolère nos cellules. Une exposition précoce aux antibiotiques peut éradiquer certains des organismes essentiels à cette éducation du système immunitaire et au développement d’une tolérance immunitaire ».
L'apport de Bacteroides au tout début de la vie pourrait corriger la dysbiose
De telles études sur les humains sont complexes, les chercheurs ont donc utilisé une souris modèle de colite : des souris génétiquement sensibles à la MICI, exposées aux antibiotiques pendant la gestation et l'allaitement, transmettent un microbiome perturbé à leurs petits, dès leur plus jeune âge. Environ 30% des bébés souris nés avec ce microbiome perturbé développent une colite. Lorsque les chercheurs criblent les microbiomes fécaux de ces souris à dysbiose induite par des antibiotiques, ils constatent l’absence de Bacteroides dans les microbiotes de souris exposées aux antibiotiques alors que ces mêmes bactéries sont abondantes chez les souris non traitées.
Les bactéries Bacteroides éradiquées par une exposition précoce aux antibiotiques et en cas de dysbiose, sont essentielles pour le développement d'une bonne tolérance immunitaire.
Et la supplémentation en Bacteroides (Bc) ?
- La greffe de Bc chez de très jeunes souris, pendant la fenêtre critique de développement du système immunitaire, corrige la dysbiose et empêche la colite ;
- mais la greffe de Bc chez des souris adultes ne corrige pas la dysbiose et aggrave même la colite. Le système immunitaire de ces souris ne reconnaît pas ces bactéries.
Il ne semble donc pas possible de restaurer les bactéries manquantes à tout moment de la vie, corriger la dysbiose est une intervention qui doit s’effectuer au cours de la fenêtre de développement du système immunitaire, c’est-à-dire suffisamment tôt dans la vie. C’est la première conclusion de l’étude.
La restauration de cette seule espèce bactérienne suffit à corriger la dysbiose à vie, c’est le deuxième enseignement de l'étude.
« De minuscules changements peuvent avoir un impact considérable sur un système »
Les MICI sont causées par nos propres microbes commensaux, c’est le troisième enseignement de cette étude. Ces bactéries commensales sont présentes dans le microbiome normal et sain, mais dans certaines configurations, elles peuvent se transformer en microbes pathogènes.
Il reste à valider ces résultats chez l'Homme, mais ces premières conclusions incitent à repenser notre approche de ces types de troubles immunitaires complexes, dont le risque se développe tôt dans la vie et peut-être même in utero.
Nous devons penser non pas à ce qui précède immédiatement l’apparition de ces maladies, mais à ce qui se passe tôt dans la vie. C'est à ce moment-là que nous devrions intervenir pour nos patients, concluent les auteurs.
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