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SCHIZOPHRÉNIE : Tout se joue ou presque à l’adolescence

Actualité publiée il y a 5 années 4 mois 2 semaines
Molecular Psychiatry
Un second à-coup plus tard dans le développement cérébral -à l’adolescence-pourrait favoriser la poursuite de l'atrophie de l'hippocampe et l'apparition de symptômes psychotiques.

« L'adolescence change la donne », titrent ces chercheurs de l’Université de Genève (UNIGE). Ils révèlent qu'une anomalie de développement de l'hippocampe, la zone du cerveau responsable de la mémoire et des émotions prend sa source in utero puis subit un second accoup à l'adolescence, avec l'apparition de premiers symptômes psychotiques (c sur visuel 2). Cette découverte, documentée dans la revue Molecular Psychiatry, ouvre de nouvelles voies pour comprendre les causes et la pathogenèse de la schizophrénie.

 

La schizophrénie entraîne, entre autres symptômes, des hallucinations et des troubles cognitifs et de la mémoire. Cette maladie psychiatrique touche 0,5% de la population et pourrait être liée à des anomalies génétiques du chromosome 22, connues sous le nom de syndrome de délétion 22q11. Cependant, toutes les personnes atteintes du syndrome ne développent pas nécessairement des symptômes psychotiques.

 

A la recherche des facteurs déclenchants

Les chercheurs suisses ont suivi, durant plusieurs années, des patients atteints du syndrome de délétion. Ils constatent que la taille de l'hippocampe, la zone du cerveau responsable de la mémoire et des émotions, est de taille inférieure à la normale mais suit la même courbe de développement que chez les sujets en bonne santé. Cependant, lorsque les premiers symptômes psychotiques apparaissent - généralement à l'adolescence - l'hippocampe s'atrophie de façon dramatique.

 

Le syndrome de délétion 22q11 est un trouble neurogénétique qui cible le chromosome 22. 30% des personnes touchées par ce syndrome développent des symptômes psychotiques spécifiques à la schizophrénie, tels que des hallucinations auditives, des problèmes de mémoire, des troubles affectant leur perception de la réalité et des difficultés d'interactions sociales caractérisées par une forte paranoïa. L’auteur principal, Stephan Eliez, professeur de psychiatrie à l'UNIGE explique que la schizophrénie est liée à l'hippocampe, une zone complexe du cerveau qui exécute une multitude de processus simultanément liés à la mémoire, à l'imagination et aux émotions. De récentes études ont montré que les personnes souffrant du syndrome de délétion ont un hippocampe plus petit que la moyenne. L’équipe s’est donc concentrée sur le développement de cette zone pour tenter de comprendre pourquoi certaines personnes atteintes du syndrome de délétion développent des symptômes psychotiques, et d'autres pas.

 

Un suivi de 18 années : L’équipe a suivi, durant 18 ans, 275 patients âgés de 6 à 35 ans exempts de problèmes génétiques et 140 personnes atteintes du syndrome de délétion, dont 53 avec symptômes psychotiques modérés à sévères. Les participants ont passé une IRM tous les 3 ans et les données recueillies ont permis le développement d’un modèle statistique permettant de mesurer et de comparer l'évolution de l'hippocampe chez ces 2 groupes de patients. Cette analyse montre que :

  • l'hippocampe des participants atteints du syndrome de délétion, bien que plus petit depuis le début, suit une courbe de croissance identique à celle du groupe témoin. Cela suggère que cette petite taille de l'hippocampe prend sa source in utero au cours du développement dans l'utérus ;
  • une sous-partie de l'hippocampe, appelée CA3, n’est pas affectée par cette réduction de taille : or CA3 joue un rôle crucial dans la mémorisation ;
  • vers 17 ou 18 ans, les patients présentant des symptômes schizophréniques subissent une atrophie radicale de la taille de leur hippocampe, et tout particulièrement dans la zone CA3, bien que CA3 ait initialement réussi à se développer normalement.

 

Quelle corrélation entre la baisse du développement de CA3 et les symptômes de schizophrénie ? Les auteurs évoquent un phénomène de compensation : l’hyperactivité en compensation de la plus petite taille de l’hippocampe, qui, en cas de facteur de stress et en particulier pendant la période critique de l'adolescence, pourrait entraîner une augmentation significative du glutamate, qui "empoisonne" l'hippocampe et provoque son atrophie. Ainsi, un second à-coup plus tard dans le développement cérébral -à l’adolescence-pourrait favoriser la poursuite de l'atrophie de l'hippocampe et l'apparition de symptômes psychotiques.

 

L’équipe étudie actuellement la possibilité de prévenir cette atrophie de l’hippocampe afin de préserver ses fonctions et de prévenir les symptômes de schizophrénie.


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