C. difficile : Avec les graisses, la bactérie prospère
L’infection à Clostridium difficile est l’une des infections les plus courantes et les plus sévères. Apprendre qu’elle prospère avec un régime riche en protéines et en matières grasses a donc des implications évidentes, en particulier pour les personnes qui reçoivent un diagnostic d'infection. Cette étude, présentée dans la revue mSystems, de l'American Society for Microbiology, montre ainsi que des souris nourries avec un régime riche en protéines et en graisses sont plus susceptibles de contracter une infection mortelle à C. difficile mais qu'un régime riche en glucides peut protéger contre l'infection. La bactérie aussi a donc ses préférences alimentaires
L'infection à C. difficile est une infection dans le gros intestin, qui peut être mortelle, en particulier chez les patients qui doivent prendre des antibiotiques pendant une longue période et notamment au cours du vieillissement. En cas de déséquilibre intestinal, Clostridium difficile commence à se développer et à libérer des toxines qui attaquent la muqueuse de l'intestin et entraînent des symptômes sévères.
Le nombre de cas d’infections à Clostridium difficile augmente et les souches deviennent plus meurtrières : aux Etats-Unis, on estime à 450.000 environ, l’incidence annuelle des infections à C. difficile, en Europe, à 125.000. Avec un taux de décès élevé, de 3% en moyenne, 3.700 décès liés à l’infection étant recensés chaque année en Europe. Enfin, ces dix dernières années ont vu l’émergence de nouvelles souches de C. difficile, associées à des épidémies d’infections graves dans le monde entier.
Graisses et protéines favorisent la vulnérabilité à l’infection à C. difficile
L’alimentation affecte le microbiome intestinal mais ? Si cette étude menée chez la souris va nécessiter confirmation chez l’Homme de ce lien entre un régime alimentaire riche et l’infection à C. difficile, la voie devra être explorée, insiste l’auteur principal, le chimiste Ernesto Abel-Santos, de l'Université du Nevada à Las Vegas : « Nous savons que de nombreuses personnes suivent ce type de régimes alimentaires et nous n'avons pas d’idée précises de leurs effets sur nos systèmes ».
L’étude est ici menée sur 4 groupes de 5 souris. Chaque groupe a reçu des antibiotiques et a été nourri avec un régime alimentaire différent :
- un régime riche en graisses et riche en protéines,
- un régime riche en matières grasses et faible en protéines,
- un régime riche en glucides,
- un régime de laboratoire standard pour les souris expérimentales.
L’expérience livre des résultats surprenants : les animaux du groupe régime riche en protéines et en matières grasses développent des infections sévères et meurent en 4 jours. 2 souris du groupe régime riche en graisses et pauvre en protéines, meurent également. Dans le groupe régime riche en glucides, seules 2 souris ont présenté des symptômes bénins puis se rétablissent. Enfin, dans le groupe de régime standard, tous les animaux ont montré des signes d'infection mais se sont également rétablis.
Alimentation et infections : cette étude confirme que l'alimentation peut favoriser certaines communautés microbiennes qui peuvent être bénéfiques : pour qu'une infection se développe, il faut à la fois une éradication de ces « bonnes bactéries » par des antibiotiques par exemple, puis un régime qui favorise la prolifération de l’infection ». L’étude livre un autre résultat intéressant : le régime riche en glucides apparaît protecteur contre l'infection à C. difficile mais donne naissance à la communauté de microbes la moins diversifiée. Les chercheurs expliquent : « De nombreuses études ont déjà conclu qu'une plus faible diversité microbienne est toujours une mauvaise chose, mais dans ce cas, c’est la configuration qui apporte la meilleure protection contre l’infection ».
Il va maintenant falloir confirmer ce lien entre l'alimentation et l'infection à C. difficile chez l’Homme. Mais, d’ores et déjà, cette étude peut dissuader les personnes à risque -comme les patients sous antibiotiques par exemple- d’adopter certains régimes alimentaires comme le régime « Keto », « Paléo » ou encore Atkins basés sur des repas riches en graisses et en protéines et pauvres en glucides. Car ces régimes pourraient « attirer » les bactéries Clostridioides difficile.
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