MAMMOGRAPHIE assistée par IA : Un dépistage plus intelligent ?
C’est le premier essai randomisé à confirmer que le dépistage par mammographie assisté par l'intelligence artificielle (IA) est sûr et réduit de près de moitié la charge de travail des radiologues. Cette analyse intermédiaire publiée dans la revue The Lancet Oncology, révèle même que cette technologie est aussi efficace que 2 radiologues spécialisés en santé du sein travaillant en équipe et cela sans augmenter le risque de faux positifs et en réduisant de près de moitié la charge de travail de lecture d'écran.
Il a été démontré que le dépistage du cancer du sein par mammographie améliore le pronostic et réduit la mortalité en détectant le cancer du sein à un stade plus précoce et plus facile à traiter. Cependant, on estime que 20 à 30 % des cancers qui auraient dû être détectés par la mammographie de dépistage précédente sont manqués. Les directives européennes recommandent une double lecture des mammographies de dépistage par 2 radiologues afin d'identifier correctement les cas suspects. Cependant, la pénurie de radiologues du sein et le temps nécessaire à leur formation ne permet pas aujourd’hui d’optimiser la sensibilité de ce mode de dépistage.
L'IA a donc été envisagée comme 2è vérificateur des mammographies, ce qui pourrait permettre de réduire la charge de travail des radiologues et d’améliorer la précision du dépistage. La technologie a obtenu des résultats encourageants dans des études rétrospectives, montant sa capacité à trier les images et en apportant aux radiologues des repères de détection assistée par ordinateur (CAD : computer-aided detection) sur les images suspectes afin de réduire les faux négatifs.
Cette analyse permet d’entrevoir tout le potentiel de l’IA dans les programmes nationaux de dépistage du cancer du sein et d’autres cancers peut-être. D’autant que l’étude analyse les premières données d’un très large échantillon de femmes, plus de 80.000 et suggère que la nouvelle technologie a permis de détecter 20 % de cancers en plus vs la double lecture systématique des mammographies par 2 techniciens radiologues du sein.
L’étude, Mammography Screening with Artificial Intelligence (MASAI), est menée entre avril 2021 et juillet 2022 auprès de 80.033 femmes âgées de 40 à 80 ans ayant subi une mammographie de dépistage (en Suède) et réparties au hasard à l’analyse de leur mammographie assistée par l'IA (avant que la mammographie ne soit également lue par 1 ou 2 radiologues ou à l’analyse standard réalisée par 2 radiologues sans IA. Les auteurs précisent que la limite acceptable la plus basse pour la sécurité clinique dans le groupe d'intervention a été fixée à un taux de détection du cancer supérieur à 3 cancers pour 1.000 femmes dépistées. Les femmes ayant des mammographies suspectes ont été rappelées pour des tests supplémentaires. L’essai montre que :
- l’AI n'a pas fourni de score de risque dans 0,8 % des cas (306/39.996), ces cas ont été référés au dépistage standard par double lecture de radiologues ;
- les taux de rappel sont en moyenne de 2,2 % (861 femmes) pour le dépistage assisté par l'IA et de 2,0 % (817 femmes) pour la double lecture standard sans IA ;
- ces taux sont globalement similaires au taux de rappel moyen de 2,1 % ;
- au total, 28 % des participantes rappelées à la suite d’un dépistage assisté par l'IA sont diagnostiquées avec le cancer vs 25 % rappelées à la suite du dépistage standard : cela signifie qu’ici, l’IA a permis de détecter 41 cancers supplémentaires -dont 19 invasifs et 22 in situ ;
- le taux de faux positifs est identique et de 1,5 % dans les 2 bras ;
- au final, les chercheurs calculent que le dépistage assisté par l'IA permet un taux de détection du cancer de 6 pour 1.000 femmes dépistées vs 5 pour 1.000 pour la double lecture standard sans IA ;
-
cela équivaut à détecter 1 cancer supplémentaire pour 1.000 femmes dépistées.
- 36.886 lectures d'écran de moins par les radiologues ont été nécessaires dans le groupe dépistage assisté par l'IA vs groupe témoin ce qui représente une réduction de 44 % de la charge de travail des radiologues.
Cependant, il faudra encore attendre plusieurs années pour vérifier que l'IA réduit les cancers d'intervalle ou cancers diagnostiqués entre les dépistages. D’autant que ces cancers ont généralement un pronostic plus sombre que les cancers détectés lors du dépistage.
« Le plus grand potentiel de l'IA à l'heure actuelle est qu'elle pourrait permettre aux radiologues d'être moins submergés par la quantité excessive de lectures.
Bien que notre système de dépistage assisté par l'IA nécessite au moins un radiologue en charge de la détection, il permet d’éliminer dans la plupart des cas le besoin de double lecture et d’alléger la charge de travail des radiologues qui peuvent alors se concentrer sur les diagnostics plus complexes ».
Il faudra également s’assurer du risque possible d'un surdiagnostic et donc obtenir plus de données sur l'agressivité des lésions détectées.
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